Andrea Chénier en concert à Lyon : la hauteur du drame
Alors que la première production de la saison, chef d'œuvre germanique moderne en la personne de Wozzeck mis en scène par Richard Brunel s’achève à peine, le chef italien Daniele Rustioni plonge dans la version concert d'un ouvrage intensément bel cantiste.
Le ténor italien Riccardo Massi, dans le rôle-titre d’Andrea Chénier, se montre charismatique et enjoué : le chanteur se plait à donner un air séducteur et taquin à son personnage, avant de verser dans la tragédie (à sa condamnation à mort). Doté de graves à la fois corsés et souples, les lignes sont polies, lisses et bien maitrisées. Les aigus restent en revanche parfois un peu voilés (un manque de clarté qui se fait sentir lors de ses airs).
Madeleine de Coigny est incarnée par la soprano italienne Anna Pirozzi. Mêlant la sensibilité des nuances raffinées à la puissance qu'exige son rôle, se voix se montre en pleine forme. Son phrasé se fait particulièrement puissant et touchant, au service de la sensibilité en soliste comme en duo, en un côte à côte tendre et passionné.
Amartuvshin Enkhbat interprète Charles Gérard d’une voix particulièrement percutante et ronde (parfois au détriment du texte). Le baryton mongol émet un son plein et constant qui emplit la salle avec aisance.
La mezzo-soprano Sophie Pondjiclis campe Comtesse de Coigny et Madelon de manière élégante et sincère. Sa voix charnue et ronde se prête pleinement aux moments de tension intense, mais reste un peu réservée lors des moments plus légers, se laissant couvrir par l’Orchestre.
Des chanteurs de l’Opéra Studio de Lyon intègrent leurs jeunes voix avec talent à cette version concert. La mezzo-soprano Thandiswa Mpongwana incarne une Bersi à la présence efficace, par des graves onctueux et mordants. Le ténor Filipp Varik offre une présence pétillante et dynamique à l'Incroyable, s’appliquant à rendre son texte vivant et clair, d'un timbre fin et distinct évoquant clairement la sournoiserie du personnage. Le ténor Robert Lewis est un Abbé au timbre soyeux et plein. Alexander de Jong incarne Jean-Baptiste Mathieu et Pierre Fléville d'une voix riche et posée, valorisant ses accents graves envoutants. Le baryton Pete Thanapat interprète Roucher avec conviction et entrain. La diction remarquée et la ligne mettent en valeur un vibrato homogène et épais. La basse Hugo Santos alterne les rôles de Dumas et Schmidt de façon solennelle et sonore par un timbre particulièrement résonnant et caverneux. Enfin la basse Kwang Soun Kim campe un Fouquier-Tinville assuré et éloquent.
Le Chœur de l’Opéra national de Lyon prend part à l’intrigue par des interventions massives et brillantes. En tutti, chacun s’investit dans l'ampleur vocale que l'œuvre exige. L’Orchestre de l'Opéra national de Lyon, dirigé par Daniele Rustioni, accorde virtuosité et intensité à la partition, par de belles lignes colorées et un entrain certain. Le drame se fait ressentir de plus en plus jusqu’au finale, où un feu d’artifice dramatique et musical explose en salle.
Avant la représentation de ce soir 18 octobre au Théâtre des Champs-Élysées, c'est une véritable ovation qui accueille l'ensemble des artistes à l'issue de cette version concertante lyonnaise.
❓ Qui est André Chénier, ce poète qui inspira à Umberto Giordano l'opéra du même nom (à un "a" près) ?
— Théâtre des Champs-Elysées (@TCEOPERA) October 18, 2024
? Petites révisions avant Andrea Chénier ce soir en version de concert !https://t.co/LzNGQdyvmk pic.twitter.com/ShAVE9c4Jn