La Fondation Bettencourt Schueller qui encourage la pratique du chant choral, son potentiel d’épanouissement personnel et collectif tout autant que son excellence, propose depuis 2020 son Festival Chants libres pour faire rayonner cet engagement le temps d’un grand week-end dans plusieurs régions de France. En cet après-midi dominical, l’Hôtel national des Invalides accueille ainsi deux concerts (gratuits comme les autres événements de cette initiative) intitulés « Cathédrale sonore » en sa Cathédrale Saint Louis.

Largement ensoleillée, la belle église se pare d’une chaleureuse couleur qui accompagne à propos les harmonies des œuvres sacrées du XXe siècle proposées dans ce programme. Sous la direction ferme du chef britannique Stephen Layton, le chœur d’artistes professionnels accentus partage un son agréablement moelleux et sans aspérité. Quelques voix ressortent très légèrement dans chacun des pupitres, révélant quelques meneurs qui assurent l’ensemble. L’attention de chacun est patente et très appréciable, particulièrement pour les respirations, permettant ainsi des phrasés de qualité. Si quelques contrastes auraient sans doute pu se déployer davantage (le pupitre des contralti notamment qui assume le rôle-pivot apportant très souvent la teinte des harmonies), le chœur connu pour sa méticulosité propose des nuances efficientes, partageant ainsi les très belles harmonies des œuvres de Pierre Villette et de Benjamin Britten. Les passages un peu plus contrapuntiques, où s’entremêlent les mélodies, pourraient au contraire gagner en clarté pour en apprécier pleinement les subtilités.

Accentus est rejoint par le Chœur de Grenelle, ensemble amateur néanmoins composé de musiciens sûrs – plusieurs ayant été maîtrisiens –, pour une disposition en plusieurs groupes aux coins de la cathédrale, enveloppant ainsi le public des longues et délicates tenues du Immortal Bach de Knut Nystedt, partant du choral « Komm süsser Tod » de Bach. Ne quittant quasiment jamais le contact avec le chef, placé en plein milieu de la nef pour être visible de tous, les artistes de chœur se montrent extrêmement attentifs, usant parfaitement de la technique chorale de gestion du souffle qui permet à un chanteur de respirer avec discrétion à un autre moment que ses collègues pour ne pas modifier le son de l’ensemble et offrir des phrases potentiellement infinies, immortelles. Cette longue pièce non mesurée et spatialisée hypnotise et apaise avant que les deux ensembles ne se rejoignent dans le c(h)œur de la cathédrale pour entonner l’hymne Chants libres, spécialement écrit pour cette édition 2023 mêlant en introduction l’ouverture du Fidelio de Beethoven et le célèbre Va pensiero de Verdi où se mêlent les paroles originelles italiennes et quelques autres françaises d’après « Je chante avec toi liberté » de Nana Mouskouri.

L’arrangement pour chœur a cappella reste relativement simple pour être ainsi chanté par tous les chœurs, professionnels et amateurs, dans toutes les manifestations du festival, restant facilement et agréablement dans la tête des auditeurs qui applaudissent avec reconnaissance la qualité et la finesse d’interprétation des deux chœurs.