Passion baroque de Vienne à Venise et à Vézelay
La petite église de Saint-Germain d’Auxerre devient cet après-midi le théâtre de Sepolcri, pièces sacrées chantées au moment de la Semaine Sainte, inspirées de la mort de Jésus. Pour ce concert, L'Escadron Volant de la Reine choisit d’interpréter le Sepolcro nell’Orto, parmi les onze composés par Ziani, compositeur prolifique à la cour des Habsbourg. Certains musicologues, du fait de la proximité des styles, pensent que Vivaldi aurait pu connaître ces sépulcres, voire aurait eu Ziani comme professeur à Venise. Aussi, les œuvres de Vivaldi sont-elles ici intercalées entre celles de Ziani, avec lesquelles elles sont mises en miroir.
Ce n’est pas sur une scène, mais depuis la nef de l’église que commence le concert, les voix des chanteurs survenant dans le dos des spectateurs. Alors que les autres gagnent la scène, la voix de la soprano Maïlys de Villoutreys, ici Maria Giaccobe, s’élève depuis la chaire, lumineuse, éclairant un chant finement tracé, dessiné, ouvragé qui, au fil du concert, se dégage et gagne en assurance.
Le rôle de Maria Maddalena est quant à lui interprété par la soprano Eugénie Lefebvre. La voix est plus profuse, moins nette, mais dotée d’une jolie palette de couleurs chaudes qui tapissent le fond.
Anthea Pichanick, Veronica, se distingue par un mezzo chaud, aux riches nuances de graves relevées par un chant souple et surtout, aisé, fusant avec naturel dans l’église et donnant corps au texte avec intensité et profondeur.
Le baryton-basse Renaud Bres, ici Nicodemo, expose un timbre assez sombre, avec un fond guttural, lui aussi profond, mais de moindre étendue. Le chant est plutôt net et bien construit.
Enfin, le ténor Antonin Rondepierre chante Giuseppe d'Arimatea. Il présente un timbre clair et épuré. Appliqué dans la projection de la voix, il est à la fois précis et engagé dans le chant, tout en gardant souplesse et mobilité.
Toutes ensemble, les voix forment un chœur se répondant avec naturel, s’ajustant dans un équilibre précis et coloré rehaussant le texte avec lumière.
L’orchestre n’est pas en reste, quoique l’acoustique de l’église ne joue pas toujours en sa faveur. Néanmoins, c’est avec une vigueur bien rythmée qu’il reprend les musiques de Ziani et Vivaldi. L'Escadron Volant de la Reine n’a pas de directeur artistique, cela n’empêchant pas, au contraire, l’ensemble, chanteurs et musiciens, d’être entièrement en accord les uns avec les autres et de tous partager un engagement en accord dans leur jeu.
Le soleil lui aussi participe au concert, illuminant de ses rayons les dernières notes de Vivaldi et remerciant, avec les applaudissements enthousiastes des spectateurs, les artistes pour ce beau retour à Vienne et Venise.