Les larmes de la Mère aux Accents de Bruno de Sá et Paul Figuier à Rocamadour
Il s’agissait de l’une des affiches les plus attendues du Festival. Le public est venu en nombre pour y assister. Au programme : deux Stabat Mater, celui de Vivaldi et celui de Pergolèse ainsi qu’un Concerto et une autre pièce vocale de Vivaldi. Un concert placé sous le signe de la virtuosité et du lyrisme poignant. Mais sans doute la présence du sopraniste Bruno de Sá, qui a laissé une forte impression lors de sa venue à Rocamadour l’an passé, explique-t-elle un tel engouement de la part des festivaliers.
Il faudra patienter un peu pour l’entendre. Un changement a été opéré dans l’ordre des morceaux. C’est finalement le contre-ténor Paul Figuier qui ouvre le concert comme soliste dans le Stabat Mater de Vivaldi. Les longs motifs épanchés de l’œuvre lui permettent de mettre à profit toute son expressivité, d’une voix chaude à l’émission ciselée. Sur les morceaux plus emportés, il démontre son agilité. Le timbre est riche en couleurs et résonne amplement sous les voûtes de la basilique.
L’ensemble Les Accents interprète ensuite le Concerto pour violon en mi mineur de Vivaldi. Thibault Noally devient alors chef et soliste. Il démontre toute la virtuosité de son jeu, tant sur les longues notes tenues et vibrées du mouvement lent que sur les motifs rapides et endiablés du troisième mouvement. Sous sa direction, l’ensemble sonne parfaitement synchronisé, sans sacrifier le relief et l’émotion.
© François Le Guen | © François Le Guen |
Dès les premières mesures du motet In furore justissimae irae, Bruno de Sá captive son auditoire par sa voix lumineuse, d’une souplesse hors du commun. Sa conduite de phrasé est d’une grande précision, enrichie par d’infinies nuances expressives jouant sur l’intensité, les attaques ou la matière même de la voix, véhiculant une émotion à fleur de peau. Tout semble naturel, ou plutôt fait d’instinct avec une remarquable sincérité. Sa voix n’a certes pas un immense volume, mais projetée à pleine puissance, elle résonne amplement.
Avec de tels interprètes, le duo sur le Stabat Mater de Pergolèse promettait d’être de toute beauté. Le premier morceau paraît trop court pour goûter à l’harmonie des deux voix en contrepoint. Les timbres, aux sonorités complémentaires, se mêlent agréablement. Paul Figuier apporte un socle satiné où vient scintiller le fil d’argent vocal de Bruno de Sá. La performance est si aboutie que le public en redemande. Il sera gratifié d’une reprise du finale en guise de bis, terminé par une impressionnante section de vocalises, parfaitement maîtrisée.
© François Le Guen | © François Le Guen |
Le concert s’achève sous les acclamations. La basilique est si remplie que certains spectateurs ont dû prendre place dans la chapelle contiguë de la célèbre vierge noire de Rocamadour. L’émotion et la joie se lisent sur tous les visages.