Récital Haendel par Marina Viotti : les Champs-Elysées toujours en forme Olympique
Si Marina Viotti baigne en ce moment dans Vivaldi, c’est Hændel qu’elle choisit de chanter ce soir, toujours dans l’esprit baroque. La première partie est consacrée aux arias en anglais (comme « All Danger disdaining » de Deborah ou « Where shall I fly » d'Hercules), la seconde aux italiens avec des classiques comme « Ombra cara » ou « Verdi prati » – un air que Marina Viotti dédie, ce soir, à Jodie Devos.
Au programme également, quatre concertos de Hændel laissant la part belle à l’orchestre, dont le premier (Concerto grosso op.3 n°2 en si bémol majeur) qui entame la soirée. À la baguette des Musiciens du Louvre, Marc Minkowski propose une direction souple et animée, fluide et organique, parfois légèrement floue dans les nuances, mais vivante et colorée, plutôt enthousiaste autant chez le chef que chez les musiciens.
Marina Viotti fait son entrée sur scène vêtue d’une longue robe bleue, un foulard couvrant ses cheveux, rappelant les héroïnes bibliques (Esther, Deborah…). Elle aborde chaque aria avec, d’abord, beaucoup de précision, démontrant un chant extrêmement bien dessiné, une ligne parfaitement tracée (déviant légèrement de temps à autre, mais pour mieux revenir structurer). Le timbre est brillant, assez contrasté, d’autant plus que la cantatrice explore le bas de sa tessiture, qu’elle s’applique à maintenir fermement en équilibre. Dans cette première partie du récital, la mezzo-soprano prend le temps d’installer son chant, pour mieux le faire vibrer et rendre avant tout par la voix, plutôt que le jeu scénique, le tragique qui se joue – par exemple dans le « Where shall I fly » d'Hercules, à la fois intense et émouvant.
Pour la deuxième partie du concert, Marina Viotti quitte la robe pour un ensemble avec veste en cuir jaune éclatant. Plus relâchée, même si gardant toujours cet équilibre dans la netteté du chant, elle aborde avec énergie et émotion les airs en italien. Les contours de la voix sont nets, la diction précise. Son « Ombra cara » est particulièrement poignant, le chant relevant avec beaucoup de naturel la tristesse de l’aria.
Infatigables, Marina Viotti et Marc Minkowski se lancent non dans un ou deux bis, mais dans quatre, dont deux surprises. Pour le premier, une voix grave se détache soudain du public et bondit sur la scène un autre chanteur, Christian Zaremba, qui vient rejoindre Marina Viotti. Ensemble ils chantaient “Oh! che muso, che figura!” de L'Italienne à Alger (Gioachino Rossini) pour Musiques en fête en direct des Chorégies d'Orange le 19 juin dernier. Ce soir ils forment le duo Daphné et Appolon dans la cantate de Hændel. La voix est plutôt claire, bien tenue et dégagée, un peu couverte cependant par celle de Marina Viotti. Le duo est cependant extrêmement dynamique et se termine sur un baiser des deux chanteurs.
Deuxième surprise de la soirée, celle de Marc Minkowski qui présente au public « un motet scandinave redécouvert il y a cinquante ans », pour voix de femmes, retranscrit ici pour l’orchestre par Laurent Couson. Dès les premières notes, le public, cultivé, reconnaît ledit « ancien motet » : Gimme! Gimme! Gimme! du groupe Abba. Marina Viotti revient sur scène, chantonne un peu et invite tout le monde à se joindre à elle.
C’est toutefois sur Vivaldi, avant de reprendre L'Olimpiade pour la dernière fois le lendemain, que Marina Viotti achève un bis plein de bonheur, sous les applaudissements d’un public absolument conquis.