D’âme Nature : les éléments réunis pour la Schubertiade de Sceaux
Cette proposition, conçue dans une version scénographiée par Gabriel Grinda est donné en version concert-lecture à la Mairie de Sceaux, dans le cadre de sa Schubertiade (romantique hommage aux réunions de musique de chambre). Quoiqu'il en soit, le projet vise à offrir une "ode" et un "pèlerinage" en alternant pièces musicales et morceaux littéraires.
Le programme s'ouvre ainsi avec la faune et la flore, enchaînant tout d'abord la mélodie Le Papillon et la Fleur (première mélodie composée par Gabriel Fauré -sur un texte de Victor Hugo-, compositeur fort à l'honneur de ce spectacle en cette année commémorant le centenaire de sa mort) et la poésie Le Cygne de René-François Sully Prudhomme (que Fauré a également mis en musique, notamment avec son tube Les Berceaux). Le programme se poursuit ainsi avec un Bestiaire, pour s'éloigner progressivement du lien littéral à la nature et cheminer vers des natures plus poétiques et sentimentales tant avec Marcel Pagnol, Pétrarque que Barbara.
La chanteuse Laure Baert et le comédien Jean-Philippe Puymartin alternent mais interagissent (jusqu'à partager une valse pendant quelques seconde sur le bout de plateau surélevé). Dans une longue robe perlée et pied nus, elle se présente avec son timbre aux colorations chaleureuses, y compris dans les aigus et les nuances forte. Cependant, elle est parfois couverte par les instruments dans ses nuances plus légères (l'acoustique de la salle municipale n'aidant pas). Son chant traverse les différentes langues, époques et esthétiques en restant toujours intelligible et bien articulé, agrémenté d'un vibrato savamment dosé. Sa prestation vocale renvoie aussi à la thématique du programme et de l'environnement, son timbre brillant progressivement davantage, à mesure que le soir s'avance.
La pianiste Elena Rozanova se montre technicienne du clavier notamment dans l’interprétation du fameux “Vol du bourdon” de Rimski-Korsakov : maitrisant son jeu sur le bout des doigts (elle peut regarder en l'air même pendant les traits rapides), mais aussi sur le bout des pieds, tapant sur la pédale faisant résonner les cordes. Ses mouvements sont fluides, énergiques, toujours prêtant attention aux autres interprètes sur scène, montrant notamment sa complicité avec la violoncelliste Diana Ligeti.
Celle-ci, soliste expérimentée et directrice artistique des Écoles d’art américaines de Fontainebleau (lointaine héritière de Nadia Boulanger à ce titre) propose un touché expressif, poétique, donnant vie à son instrument qu’elle parcourt aisément. Son jeu souple semble un prolongement d'elle-même, sa respiration fusionnant avec celle de l'instrument qui porte sa "voix".
Enfin, le comédien Jean-Philippe Puymartin oscille entre une éloquence poétique et un humour léger dans la déclamation des textes. Il amène une certaine ambiguïté artistique, s'adressant à lui-même (dans une réflexion interne) comme s'il s’adressait au public, et réciproquement. Idem pour la contenu de ces textes, dont la grande subjectivité devient ainsi universelle (notamment pour les sentiments amoureux).
La salle applaudit cette soirée sur le thème de la nature et de l’amour, conclue en bis avec la chanson “Besa me”, comme une invitation à embrasser le monde qui nous entoure.