Ô mon bel inconnu souhaite à 2024 la bienvenue à l’Opéra d’Avignon
Treize melons à la douzaine
L’action se déroule chez les Aubertin, une famille de chapeliers dans laquelle rien ne va plus ! L’année se termine (justement) et la famille a besoin d’une bouffée d’air, d’une échappatoire avec ambiance farfelue ! Le père de famille a donc eu l’idée de se doter… d’une maîtresse (sauf que celles qui répondent à son annonce anonymisée ne sont autres que... sa propre épouse, sa fille, et même sa bonne). De quoi déclencher une myriade de quiproquos et de jeux de mots et d’esprit envahissant le livret, très amusant au demeurant. Les décors d’Anne-Sophie Grac placent les personnages dans une maison bourgeoise qui fait également office de boutique à chapeaux. Les costumes, également signés Anne-Sophie Grac, sortent d’un exquis atelier, assortis aux décors de la maison de nos amis chapeliers. Émeline Bayart propose une mise en scène très fluide et dynamique, pleine d'espièglerie et d’une fraîcheur candide et sympathique… Elle incarne également la bonne de la famille, Félicie, avec une énergie et une vivacité d’esprit débordantes. Elle fait rire ainsi le public avec des pantomimes et peu importe si son chant franc n’est clairement pas lyrique.
Le père de famille Prosper, prospère en chapelier qui joue du chapeau. Il est interprété par Marc Labonnette. Sa voix large et bien projetée remplit la salle, affirmant au caractère un air plus sérieux, mais qu'il fait d'autant craquer par son jeu expressif à la Louis de Funès, comique et curieux. Après Labonnette, Antoinette, interprétée par Clémence Tilquin, donne à son personnage une voix veloutée et un air un peu taquin. Sa ligne de chant et son interprétation sont très élégantes, la mère Aubertin se distinguant ainsi d'une allure charmante. Marie-Anne, la fille, est interprétée par Sheva Tehoval, qui séduit le public grâce à son jeu théâtral ainsi que par une voix claire et lisse. Victor Sicard est son admirateur Claude très sûr de lui et séduisant, faisant montre d’un chant aux graves saisissants. Sa ligne musicale élégante est très claire, lui donnant ainsi toutes les chances de plaire. Jean-Paul (admirateur d'Antoinette) et M. Victor (loueur de villa à Biarritz) sont interprétés par le ténor Jean-François Novelli, qui caractérise son timbre avec lumière et contours. Il déclame son texte de façon très fluide, donnant à ses personnages un caractère assez comique et solide. Carl Ghazarossian incarne Hilarion Lallumette, confident muet, conférant toute son expressivité au personnage... jusqu'au miracle : il retrouve finalement sa voix, celle d'un ténor sombre, aux médiums et aux aigus sonores qui plaisent au plus grand nombre.
Le chef Samuel Jean dirige l’Orchestre National Avignon-Provence, accompagnant et soutenant les chanteurs dans leurs folies et leurs romances. Suivant ses mouvements délicats, la phalange offre un son rythmé et élégant, accompagnant, entre autres, un fameux trio féminin avec un résultat éclatant. Après l’ensemble final « Partez ! », le public applaudit de façon enthousiaste les artistes. Ne reste plus au plateau qu’à faire une révérence et au public à leur dire : Chapeau !