L’Amour à la Française (pas si académique) à l'Opéra Comique
Relancée en cette année 2023, l’Académie de l’Opéra Comique de Paris accueille pour 10 mois consécutifs douze artistes, dont cinq solistes lyriques en formation, ainsi qu’une pianiste-cheffe de chant. En collaboration avec le Palazzetto Bru Zane / Centre de Musique Romantique Française et le Musée d’Orsay, l’Opéra Comique (dans la continuité des représentations récentes de La Fille de Madame Angot et comme il déploie désormais des "pléiades" d'activités autour de ses productions) a ainsi élaboré un programme vocal de musique légère d’une durée d’environ une heure avec le concours de ces solistes.
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Préparés par Hervé Niquet et Alexandre Dratwicki, ces artistes en herbe se sont investis sans faillir dans la mise en scène vive et alerte créée pour eux par Héloïse Sérazin. Quatre jeunes femmes aux tempéraments marqués et certaines de leur charme, convoitent le même jeune homme un peu naïf et quelque peu débordé par les manœuvres plus ou moins subtiles qui l’entourent. Un texte sous forme de marivaudage vient relier les morceaux interprétés, que ce soit les airs séparés, les duos et ensembles. Le choix du répertoire interprété fait la part belle aux pages vocales savoureuses de Reynaldo Hahn, avec plusieurs extraits de sa comédie musicale sur un texte de Sacha Guitry, Ô mon bel inconnu. Au programme, figurent aussi André Messager avec Passionnément ou les couplets pleins de piquants extraits de son Bourgeois de Calais, Offenbach et sa Périchole ou La Vie Parisienne avec les Couplets de Gabrielle, “Je suis veuve d’un colonel”.
Au sein de ce répertoire dit léger, ne pouvait manquer d’apparaître le nom de Louis Varney, compositeur d’une quarantaine d’opérettes, dont L’Amour mouillé comportant l’air de Carlo "En ce bas monde, toute femme me plaît" et le duo transformé ici en quintette dit Capédiou de Miss Robinson, pièce ravissante et pleine d’esprit. Hervé, roi de l’opérette, s’illustre avec les couplets de Gaston "Cherchez la femme" de La Mère des Compagnons, ainsi que les biens oubliés (sauf d’Alexandre Dratwicki) Frédéric Toulmouche évoquant l’art du flirt dans son bien nommé ouvrage La Saint-Valentin et Laurent de Rillé avec son Petit Poucet. Jules Massenet et le duo tendre et plein d’espoir dit Duo nocturne extrait de Don César de Bazan, puis l’incontournable Barcarolle des Contes d'Hoffmann de Jacques Offenbach viennent conclure le programme de manière un peu plus savante, mais toujours dans l’esprit de cet Amour à la Française.
Les jeunes sopranos Camille Chopin et Floriane Derthe proposent, pour la première un timbre fruité et la seconde une voix un peu plus imposante, mais dotée d’aigus un peu ouverts. Les deux mezzo-sopranos, Juliette Gauthier et Marion Vergez-Pascal possèdent des moyens un peu concordants, avec un timbre qui doit encore se diversifier, se singulariser. Le ténor Abel Zamora fait valoir une voix agréable et légère, encore un peu courte à l’heure actuelle et qui doit être plus soutenue. Il s’agit de fait de talents en devenir, encore en phase de formation ou de perfectionnement.
En outre, l’acoustique de la Salle Bizet (située sous la salle de spectacle) où se déroule cette proposition ne s’avère pas particulièrement favorable pour ces jeunes voix mais, avec l’appui constamment musical et précis d’Héloïse Bertrand au piano, chacun dispense un vrai sens du spectacle et un bonheur de chanter qui entraine irrémédiablement l’auditeur. Après les trois concerts donnés au sein de l’Opéra Comique, ils se produiront pour quatre autres représentations dans le Grand Hall du Musée d’Orsay, à 19h puis 20h30, les 28 et 29 novembre prochain.