De Paris à Buenos Aires au Festival Un Violon sur le Sable
Armando Noguera ouvre d'emblée ce concert en un voyage reliant les univers transatlantiques (logique pour un Festival avec vue sur cet Océan). Il entonne en effet "Ideale" de Francesco Paolo Tosti qu'il dédie à sa mère, Italienne (comme pour nombre de ses compatriotes argentins). L'introduction du quintette à cordes est si timide et transparente, qu'il vient comme chouchouter le timbre du chanteur, très léger et onirique. Le baryton lyrique peut ainsi même se faire (presque) crooner. Et de ce registre à celui de Piaf, le chanteur ne fait qu'un pas, offrant La Vie en rose avec la même intimité sensuelle d'une voix très claire et légère (il en fera de même pour Les Chemins de l'amour), s'approchant du ténor. Et de Piaf à Brel il n'y a qu'un autre pas, franchi dans une autre transfiguration : celle de Félicien Brut lorsqu'il joue de son accordéon. Ses prouesses et sa maîtrise des styles évidentes le transforment physiquement, aussi profondément inspiré qu'extérieurement emporté par la musique. Un emportement qui le fait tournoyer musicalement, telle une valse, dans une Flambée (Montalbanaise comme il le faisait aux Chorégies d'Orange). Il finit par danser avec son instrument comme un vrai partenaire.
Le quintette semble alors décidément en retrait dans ce concert, mais c'est pour mieux laisser s'exprimer les solistes : une fois seuls -à cinq- ils allient précision et dynamisme au service de la rythmique Sud-Américaine, faisant passer l'ambiance de la valse au tango, toujours aussi riches et légers, résonnants et bondissants. Les deux violons poursuivent dans la lancée synchronisée de leurs phrasés liés, l'alto apporte les pointes d'amusement épicé tout en contribuant à la rythmique, à la fois solide et dansante avec violoncelle et contrebasse.
Le climat se rassoit, les deux solistes aussi, sur des chaises même, interprétant du Carlos Gardel comme un dialogue entre deux amis dans un salon familial en Argentine, partageant ce moment personnel fait des mêmes sentiments.
Finalement, Armando Noguera chante à pleine voix, pour le dernier morceau, "Granada" d'Agustin Lara, déployant volume et résonances.
Et même une coupure électrique ne peut plus arrêter ce concert qui s'achève dans le noir, mais heureusement les partitions sont sur des tablettes chargées et les spectateurs sortent même leurs téléphones, éclairant l'abbaye qui ressemble pour quelques minutes à un concert de rock.
Le public, très nombreux et ravi de cette soirée demande et obtient en bis le fameux "Besame mucho".
Les chemins de l'amour de Paris à Buenos Aires passent par la Charente-Maritime, et le Mexique.