Jodie Devos illumine la Sainte-Chapelle de Paris
Les fêtes de Pâques au deuxième week-end de l'Opera Festival dirigé et présenté par la chanteuse Fabienne Conrad, lui inspirent la thématique « Ombres et Lumières ».
Dans la prestigieuse Sainte-Chapelle de Paris, si le soleil couchant illumine encore ses magnifiques vitraux du XIIIe siècle, la lumière vient ensuite rayonner en son sein, par la voix de Jodie Devos. Le programme est certes profane et assez éclectique, mais néanmoins en cohérence avec ce désir de charmer, par sa précieuse virtuosité, tous les publics (ce rendez-vous est aussi l'occasion pour de nombreux touristes étrangers de passage dans la capitale d'admirer ce lieu patrimonial avec des interprètes de tout premier plan).
C’est avec une présence pleine de fraîcheur et d’une grâce touchante que Jodie Devos fait entendre une voix envoûtante, qui résonne avec plénitude sous les hautes voûtes de la Chapelle. Ses aigus sont aussi caressants qu’ils sont incandescents, montrant notamment sa pratique et son exploration du Grand Opéra français avec le sublime air « Ombre légère » extrait du Pardon de Ploërmel de Meyerbeer. Si ses aigus sont particulièrement admirés, toute sa tessiture reste séduisante avec des graves d’un beau velouté et aussi présents. En complicité avec le violoniste Hugues Borsarello, Jodie Devos parvient à mêler plaisir, tendresse et virtuosité avec l’arrangement des variations sur « Ah vous dirais-je maman » d’Adolphe Adam, le temps semblant comme suspendu lors des Lieder de Richard Strauss, Morgen et Beim Schlafengehen (célébrant le sommeil et le matin). Ils constituent le paroxysme de ces « minutes mystiques » – comme les nomment Fabienne Conrad dans sa présentation et robe noire étincelante, en français puis en anglais – qui se veulent rendre hommage à ce lieu sacré et au pouvoir royal que représente la Sainte Chapelle.
Le violoniste Hugues Borsarello charme tout autant que la chanteuse, par un jeu très clair, un soin très particulier envers le son de son instrument et pour les couleurs de ses phrasés. Le soutien de son archet traduit maîtrise et de constance, offrant une sensibilité particulièrement délicate et touchante, amusante aussi avec pièce de bravoure Puck de Grieg, respiration malicieuse et fantastique (évoquant le monde des lutins). Les deux artistes sont accompagnés par le pianiste Thomas Palmer, très attentif aux intentions et aux couleurs de ses collègues, montrant indéniablement une connaissance sensible et experte pour l’accompagnement vocal.
Pour remercier les beaux applaudissements du public, les artistes souhaitent en bis une "Belle nuit, ô nuit d’amour" (la Barcarolle des Contes d’Hoffmann d’Offenbach). Le ciel étoilé de la Sainte Chapelle laisse alors place à la nuit parisienne, déjà et encore illuminée par cette soirée charmante.
Retrouvez notre compte-rendu du concert inaugural de ce Festival, avec Patricia Petibon