Jakub Józef Orliński, “Heroe” enflammé à l’Opéra Royal de Versailles
Le public de Château de Versailles Spectacles attend visiblement avec impatience ce rendez-vous devenu annuel avec l’une des jeunes stars lyriques : le contre-ténor Jakub Józef Orliński. Dans la lancée de sa performance avec skate-boards à l'Opéra de Rouen, c'est dans le tout autre écrin de l’Opéra Royal de Versailles qu’il propose ce programme d’airs héroïques composés par Haendel exprimant l’amertume et la fureur d’amours déçues, auxquels répondent de tout aussi tempétueux extraits de concertos de Vivaldi.
Entamant la soirée avec l’ouverture de L'Olimpiade de Vivaldi (résonnant déjà avec les Jeux Olympiques qui seront à l'honneur l'année prochaine dans la Grande Salle des Croisades avec L’Olimpiade de Cimarosa), les instrumentistes (jouant presque tous par cœur tout le long de la soirée) lancent le spectacle avec l’extravagance attendue : chacun s’investit pleinement, faisant sauter les archets sur les cordes avec une énergie débordante. Les intermèdes instrumentaux enchaînent l'aisance vertigineuse de la virtuosité, sacrifiant parfois une part de justesse au profit d'intentions (d)étonnantes enthousiasmant le public avide de prouesses et de surprises.
Contrastes et accents animent toute cette musique frémissante mais la préparation et la direction du chef-violoniste Stefan Plewniak, attentives et rigoureuses, assure des élans communs et des traits bien définis. Cette synergie est également partagée avec Jakub Józef Orliński, en plus d’une évidente complicité.
Le contre-ténor est chaleureusement accueilli par le public dès son entrée, les applaudissements couvrant même encore le début de son chant. Il sait effectivement séduire déjà par sa présence souriante et élégante, dans son costume trois pièces. Sa ligne vocale fait toutefois d'abord craindre un peu d’instabilité, ses médiums-graves étant très sollicités par Tamerlano, mais il assure le moelleux de son timbre tendrement chaleureux, et bien évidemment la virtuosité des airs de bravoure. Captivant intensément les yeux et les oreilles, il regarde son auditoire d'un visage très expressif, déployant une gestuelle naturelle et sans exagération. Ses phrasés sont de délicates caresses, mais traduisent aussi les pleurs de colère traversant les peines amours perdues ou trahies relatées par les œuvres au programme. La palette expressive est parachevée par la tendresse d'Il Giustino de Vivaldi avec les pizzicati (cordes pincées) des musiciens, déclenchant de sonores bravi qui salueront également la virtuosité des passages soudains du grain du registre grave, à la brillance du registre aigu.
Le concert couronné de trois bis achève d'enthousiasmer le public et vient même à bout de l'archet du chef-violoniste qui succombe, le crin abandonnant le bois.
Mais cet arc de l'émotion sautant d'enthousiasme peut bien sûr être réparé, comme les cœurs des personnages et des auditeurs émus, et qui s'en voient derechef soignés par deux autres bis, dont en particulier le très délicat et consolateur "Dove sei, amato bene".
? Jakub Józef Orliński sera de retour en décembre prochain à l'Opéra Royal de #Versailles Découvrez l'avant-programme de notre nouvelle saison musicale 2023-2024 : https://t.co/JSajCAMLT7 https://t.co/Qjbg37uHFB
— Opéra Royal (@OperaRoyal) 4 avril 2023