Sandrine Piau et l’Ensemble Contraste, trio de cordes solaires et nocturnes à La Monnaie
Le premier récital de l'année à La Monnaie de Bruxelles s’annonce complice et délicat grâce à la présence d’un trio à cordes : cordes frappées du pianiste Johan Farjot, cordes frottées d’Arnaud Thorette et cordes vocales de Sandrine Piau.
L'Ensemble Contraste vient ici entourer avec précision la voix de la soliste française avec pour thème la dualité du temps de jour et de nuit, inspirant les compositeurs romantiques mis à l’honneur : Ludwig Spohr, Richard Strauss, Maurice Ravel et Ernest Chausson entre autres. Sandrine Piau, reconnue et décrite comme "chanteuse du clair-obscur" prouve encore une fois le pouvoir des vibrations sensibles de la voix, menant sur les chemins d’une ba(l)lade mentale à la lumière du territoire romantique.
Connue du public pour sa maîtrise de la musique baroque, Sandrine Piau joue aussi des registres en prêtant sa voix au style romantique et classique. Figure hybride de la voix et du naturel de la chanteuse, sa robe à paillettes argentée invite même à l’esprit Music-Hall (bien différente de celle blanche et païenne du Requiem par Castellucci auquel elle participait ici même).
Le timbre clair et riche de la chanteuse trace une ligne vocale précise. La prosodie impeccable et respirée offre un allemand puissant et prosodique, réchauffant la voix, de plus en plus fluide. Les aigus s’enrobent alors d’une chaleur plus cuivrée, plus véloce et précise, afin de servir Chausson. Habitée et puissante, Sandrine Piau entonne Les Heures avec une légèreté ponctuée du rythme lourd du temps qui passe, évoluant vers un romantisme plus sombre et variant. Accompagné par l’Ensemble Contraste, la complicité apparente entre les musiciens se rejoint en une prestation à triple facette. Le calme ponctué du clavier de Johan Farjot, enrobé et précis, vient s’accorder avec les tonalités vibrantes, soufflées et éthérées du violon alto d’Arnaud Thorette, laissant la chaleur de voix de Sandrine Piau apposer la limpidité de sa grande noblesse.
L’Ensemble fondé en 2000 est un grand habitué de l'hybridité musicale, oscillant entre musiques savantes, populaires mais aussi comédie musicale, jazz et même tango. Cette liberté se ressent dans la musique qui se dessine avec naturel et une très grande simplicité, que Sandrine Piau complète avec l’énergie du jour, et la profondeur de la voix nocturne.
Le public charmé aura su trouver en ce récital un retour aux sources variées du romantisme, ponctué d’une certaine modernité et d’un naturel rafraîchissant. Ce premier récital de 2023 dans une programmation empreinte de surréalisme est applaudi par un public charmé.