Chanson perpétuelle à l'Opéra Grand Avignon
Le programme, composé d’œuvres rarement jouées du répertoire français, réunit le Quintette pour piano, deux violons, alto et violoncelle en fa mineur composé par César Franck en 1879 (dédié à Camille Saint-Saëns), ainsi que deux des plus grandes œuvres pour voix et orchestre d’Ernest Chausson, à savoir la Chanson perpétuelle écrite en 1898 sur le poème Nocturne de Charles Cros, et le Poème de l’Amour et de la mer (dédié à Henri Duparc), dont le texte est basé sur les poèmes La Fleur des eaux et La Mort de l'amour (du poète Maurice Bouchor), composé sur une période particulièrement longue comprise entre 1882 et 1892.
Révélation Lyrique de l’année 2021 aux Victoires de la Musique Classique, la soprano Marie-Laure Garnier interprète Chanson perpétuelle et Poème de l’Amour et de la mer avec confiance. Elle semble cependant retenir légèrement sa voix sur le premier de ces morceaux, surtout concernant la projection et les aigus qui semblent un peu faibles. Elle n’en montre pas moins d’emblée un joli timbre velouté, porté par un grand souffle au service de l’expressivité. Elle semble beaucoup plus à l’aise lors de son deuxième passage, après l’entracte, en déployant toute l’élégance de son chant et la projection de sa voix qui emplit largement la salle. Le phrasé est très délicat, dénotant une grande sensibilité, avec des débuts et fins de phrases très soignés, toujours aussi expressive et davantage encore avec la concentration de son regard profond en direction du public, tout à fait en accord avec le texte.
La pianiste Célia Oneto Bensaid, artiste en résidence à l’Opéra Grand Avignon pour la saison 2022/2023, introduit chaque moment du concert en expliquant l’origine des œuvres. Elle se montre très à l’aise à l’instrument, ses doigts transmettant une grande sensibilité et musicalité. Son jeu est très précis et consciencieux, d’une délicatesse qui captive le public mais cela ne l’empêche pas d’allier la passion à la finesse et d’y imprimer des intentions fortes, qu’elle manifeste avec de grands gestes corporels et faciaux.
Également très investis et s’harmonisant avec la pianiste en passion et fraîcheur, les musiciens du Quatuor Hanson (fondé en 2013) : avec Anton Hanson et Jules Dussap aux violons, Gabrielle Lafait à l’alto et Simon Dechambre au violoncelle offrent un jeu très dynamique, spontané et minutieux. Les mains de la pianiste s’allient aux archets dans un son homogène, précis, empli de contrastes et de reliefs quand la partition l’exige : un déploiement de ferveur et de virtuosité qui récompense une écoute attentive à cette richesse.
Fauré vient clore ce spectacle sur une note plus gaie (après la mort de l’amour) avec L’Hiver a cessé offert en bis par ces jeunes et vertueux musiciens qui remercient les enthousiastes saluts du public.