De la Terre à la Lune avec le Chœur de l’Opéra Grand Avignon à La Scala Provence
Le programme est composé de chœurs et airs d’opéras, de chants traditionnels, de chansons populaires (et même un poème : Canto destruido du Mexicain Carlos Pellicer, récité par le régisseur du Chœur fraîchement arrivé, Christian Rivero Ramirez), tous venus des quatre coins de la planète (Bizet, Holst, Brahms, Tchaïkovski, Piazzolla entre autres) et même au-delà avec un voyage final sur la lune de la main d’Offenbach. Les morceaux sont présentés par Sylvie Rogier, responsable du service animations de l’Opéra Grand Avignon, avec une touche d’humour qui apporte fraîcheur et légèreté au spectacle.
Le Chœur produit un son homogène et bien assemblé pendant la plupart du concert, sauf lors du chœur des cigarières (Carmen) avec quelques inégalités en termes de puissance vocale dans le pupitre des ténors. La phalange, ensemble, se montre très dynamique, avec un chant bien nuancé et un beau phrasé dans la plupart des morceaux, notamment les chants traditionnels irlandais. La diction du texte italien (chœur des nymphes d'Armida de Rossini) est très soignée, claire et compréhensible. Le Chœur fait également honneur à sa pianiste accompagnatrice Maya Berdieva en interprétant un chant traditionnel turkmène très syncopé avec des attaques manquant parfois de netteté mais avec contrastes et délicatesse (ainsi qu'une puissance imposante à chaque pupitre quand nécessaire). Le panorama et le voyage sont complétés avec l'émotion d'un chant pour la paix sur un texte hébreu, Ose Shalom, mis en musique par John Leavitt, puis la qualité de la prononciation espagnole pour le répertoire argentin.
Certaines voix trouvent également leur place en solistes. La basse Pascal Canitrot interprète ainsi "O Isis und Osiris" de La Flûte enchantée avec un timbre clair, des graves assurés et des départs suaves (mais manquant de souplesse). L’alto Laura Darmon-Podevin chante l'arménien Loosin Yelav dans la version du compositeur italien Luciano Berio, avec un timbre chaud et velouté, rehaussé par un vibrato bien marqué.
Le baryton Linfeng Zhu, ayant récemment intégré le Chœur de l'Opéra Grand Avignon, interprète avec un timbre très expressif le chant louant la beauté de son pays et le gâchis de tout conflit avec Mei Gui San Yuan (Les trois Souhaits de la rose) du compositeur chinois Huang Zi. Malgré des aigus légèrement difficiles, il enchante les oreilles du public avec des départs très doux et des piani enchanteurs.
Avec le ténor Julien Desplantes et la basse Pascal Canitrot, la basse Saeid Alkhouri interprète a cappella, d'une voix charnue et caverneuse (mais des aigus faibles), L’hymne des chérubins, chant traditionnel byzantin.
Traversant l'Atlantique, la soprano Marie Simoneau enflamme le public avec une interprétation passionnée sur I could have danced all night, extrait de la comédie musicale My Fair Lady (Frederick Loewe). Très impliquée et expressive dans son rôle, sur le plan vocal et théâtral, elle fait montre d’un grand contrôle et déploie un vibrato naturel sur un timbre clair et frais, avec un aigu final brillant (mais manquant un peu de projection).
Solenne Lepère fait quitter la Terre avec La Lune paresseuse de Cécile Chaminade. Le timbre fin et velouté soutient l'investissement poétique, ses départs sont doux et bien maîtrisés, mais un peu faibles par moments, ce qui ne l’empêche pas de déployer ensuite un phrasé élégant et de rester dans son élan.
Le spectacle se termine avec Il Neige ! Nous grelottons ! extrait du Voyage dans la lune (Offenbach), interprété par Ninon Massery, Clélia Moreau, Solenne Lepère et Pascal Canitrot, impliqués dans leurs rôles et dans l'humeur légère et drôle, fidèle au style d’Offenbach. La voix de la mezzo Clélia Moreau se distingue particulièrement lors des aigus émis avec puissance, ceux de Ninon Massery par leur brillance soutenue. Dans les chœurs, le baryton Alain Iltis se démarque par une expression faciale en accord avec le caractère du morceau, restant concentré sur son interprétation vocale, mais rajoutant également un peu de sel.
La direction d’Aurore Marchand est souple et ne manque pas de précision. Cependant, elle ne déploie pas une expressivité gestuelle ou faciale à même de stimuler davantage l'interprétation des chanteurs et d’imprimer au concert sa marque plus personnelle. La pianiste Maya Berdieva fait montre d’une interprétation très délicate et expressive, très dynamique aussi lors des morceaux les plus agités. Elle reste très attentive à la cheffe et aux chanteurs du Chœur.
Malgré un malaise dans le public (interrompant Ching-a-ring chaw d'Aaron Copland pendant plusieurs minutes presque à la fin du spectacle), le concert se termine bien et il est bien accueilli par le public, qui applaudit longuement et de façon enthousiaste.
Le concert est suivi de la rencontre traditionnelle et conviviale avec les artistes des Apér’Opéras.