Ouverture de saison scintillante pour l’Orchestre national de Metz
Le public est arrivé plus nombreux encore que l’année précédente, preuve s'il en est d’un engouement des messins pour l’offre de la Cité Musicale. Dans l’atmosphère chaude de cet auditoire et de l’intense éclairage jaune qui se reflète dans le bois moderne de la salle, Marina Chiche présente en cinq minutes la nouvelle création de Clara Iannotta offerte en entrée de concert : Darker Stems (création mondiale, commande de la Cité musicale-Metz et du Festival Musica de Strasbourg), dont le sujet, grave mais non sans espoir, tourne autour de la mortalité de la jeune compositrice, et en particulier du traitement par radiothérapie de son cancer, source d’inspiration de son œuvre.
Le chef dirige à cette occasion une trentaine d'instrumentistes, avec harpe et accordéon ainsi que percussionnistes munis d’archets, saisissant le tempo au lancement de la bande sonore diffusée au moyen de grandes enceintes de chaque côté de l’avant de la scène. Le scintillement entendu se prolonge d’une manière continue avec une combinaison homogène des flûtes dans leur extrême aigu et le violon utilisant des sons harmoniques et modes de jeu sul ponticello (près du chevalet). L’atmosphère générée est ainsi à la fois suspensive et mouvante, immergeant le public de sonorités, de registres, de variations de mouvements, de scintillements mais aussi à la rencontre de la voix de la compositrice qui se devine dans la partie électroacoustique (fredonnant les mélodies uniques entendues au cours de ses séances de radiothérapie, effet des ondes électromagnétiques dans son espace).
La voix épicée de Karine Deshayes présente alors Shéhérazade de Maurice Ravel d’autant plus comme un plat chaud et même relevé, suivant cette entrée froide. Le chant est toutefois rond et très continu, faisant le choix d’un vibrato fin pour terminer ses phrases musicales et privilégiant la continuité mélodique de cette pièce (au risque de sacrifier un peu l’intelligibilité d’un texte très difficile à chanter). La mezzo-soprano poursuit ce voyage en trois mélodies contrastées, dosant ses nuances à la mesure de l'orchestre, puis se faisant enivrante et orientalisante dans son dialogue lointain avec la flûte, avant de poser la solidité d’une voix et d’une ambiance solennelle.
Le public applaudit chaleureusement pendant quelques minutes et après avoir rappelé la chanteuse. Il reste toutefois à l’auditoire un dessert très copieux : la Symphonie Fantastique d’Hector Berlioz, avec ses cinq mouvements comme autant de tableaux. L’immersion musicale et même l’euphorie y sont confirmées dans le jeu fin de l’orchestre et la clarté de la direction menant vers la fin de cette symphonie, en apothéose, déclenchant un accueil euphorique de l’auditoire.
Les musiciens apparaissent alors fatigués mais satisfaits d’entendre près de sept minutes d’applaudissements soutenus, dont deux minutes entières d’applaudissements synchrones. L'assistance est comme rassasiée après un très bon repas.