Amour baroque avec Luanda Siqueira et l'Ensemble Vedado au Festival de Sablé
La nouvelle conseillère artistique du Festival de Sablé-sur-Sarthe, la soprano Laure Baert (spécialisée en répertoire baroque), poursuit la ligne programmatrice de sa prédécesseure Alice Orange (partie après une décennie de mandat), en proposant des concerts grand public et gratuits sur la place Dom Guéranger. En cette 44e édition, le Festival offre ainsi à ses Festivaliers et à tous les concitoyens un après-midi musical articulé autour de chansons d'amour baroques, en invitant un quatuor cubano-brésilien (l'Ensemble Vedado) sous la direction du violiste (viola da gamba) Ronald Martin Alonso, avec violon et théorbe (Reynier Guerrero et Daniel de Morais). Collaborateur de grands ensembles baroques dont notamment La Cappella Mediterranea, Ronald Martin Alonso fait appel à la soprano Luanda Siqueira pour ce programme lyrique franco-anglais de la première moitié du XVIIe siècle, programme qu'il avait déjà interprété en compagnie de Dagmar Saskova. Ces histoires d'amour chantées sont puisées parmi les Airs de cour (français) du XVIIe siècle, qui était cousus d'ornements vocaux mettant en exergue à la fois la beauté de la voix et l'émotion qui en dérive. D'autre part, les poèmes musicaux de John Dowland ou encore les lamentations amoureuses de Purcell, inspirés par la dentelle sonore des madrigaux italiens, complètent ce programme finement conçu.
Luanda Siqueira relève le défi de la sonorisation de la voix en extérieur, un choix toujours délicat pour les chanteurs. Elle parvient à un juste équilibre sonore qui s'intègre bien dans l'ambiance intimiste du concert. Sa ligne tendre et veloutée insuffle l'émotion aux mots savamment prononcés, surtout en français, dissimulant ses origines non francophones. Son articulation soignée, notamment des "r" roulés, traduit une quête vers l'expression musicale la plus éloquente possible. Son phrasé est lisse et élégant, truffé de figures plaintives et lyriques qui font teinter le son, conformément aux exigences du style (tel "Amour, cruel amour" de Sébastien Le Camus). Malgré une couleur vocale plus foncée, elle s'épanouit pleinement dans les aigus alors que de l'autre côté de la gamme, les notes (graves) restent sans appui et sans force. La projection est droite et finement vibrée, avec des aigus purs, vigoureux et de velours.
Les musiciens menés par Ronald Martin Alonso accompagnent la soliste doucement et intimement. Le jeu est galant et raffiné, surtout dans les pièces instrumentales de Monsieur de Sainte-Colombe ou Demachy. Le trio se présente d'un air allègre et enjoué, bien coordonné dans l’expression.
Le concert s'achève par une version baroque de la Javanaise de Gainsbourg, chantée en chœur avec le public enamouré sur la place Dom Guéranger.