Partenope de Haendel par William Christie et le Jardin des Voix aux Hospices de Beaune
27ème opéra de Georg Friedrich Haendel, Partenope, ouvrage en trois actes sur un livret adapté de Silvio Stampiglia, a été créé au King’s Theatre de Londres en février 1730. L’histoire développée apparait simple au départ avant de se complexifier. Partenope, Reine légendaire fondatrice de la ville de Naples, suscite l’amour de trois seigneurs, Armindo Prince de Rhodes, Emilio Roi de Cumes et Arsace, Prince de Corinthe. Ce dernier, fort inconstant, semble oublier qu’il est déjà fiancé à la Princesse Rosmira de l’île de Chypre. Cette dernière apparaît alors sous les traits d'Eurimène, « Prince Arménien », afin de regagner incognito les faveurs du jeune homme. Vaste parade amoureuse visant à conquérir le cœur de Partenope, l'œuvre aux multiples rebondissements est imprégnée de touches de légèreté et aligne les querelles sentimentales, dans une certaine forme de marivaudage, certains personnages étant à la limite de la caricature. Le public des Hospices ne s’y trompe pas et fait retentir à de nombreuses reprises un rire franc et sans ambiguïté. Le dénouement vient du duel final devant opposer, poitrine nue, Arsace et Eurimène (qui n'est donc autre que Rosmira, la fiancée de ce dernier). Tout rentre finalement dans l’ordre et Partenope se lie au timide Armindo.
Présenté pour la première fois en son Festival vendéen de Thiré à l’été 2021 avec les lauréats du 20ème anniversaire de l’Académie du Jardin des Voix, Partenope fit notamment escale à la Philharmonie de Paris (notre compte-rendu). Dans une mise en espace agréable et pleine de trouvailles réglée par Sophie Daneman, les jeunes artistes présents -inchangés depuis Thiré-, donnent le meilleur d’eux-mêmes. Ana Vieira Leite livre dans le rôle de Partenope une prestation sensible et fort nuancée. Sa jolie voix de soprano souple sinon étendue, à l’aigu aérien et brillant, se pare de grâce dans les vocalises. Elle démontre une musicalité innée qui trouve son meilleur dans l’aria du premier acte "Io ti levo l’impero dell’armi" qu’elle adresse à Arsace et dans celui ravissant de l’acte suivant "Qual farfalletta" (Tel un papillon).
Dans le rôle d’Arsace, le contre-ténor Hugh Cutting se voit chargé des morceaux les plus imposants de l’ouvrage. Son timbre lumineux, son phrasé subtil et expressif, son engagement même, donnent beaucoup de caractère au personnage. Les écarts et terribles sauts d’octaves de l’air "Furidondo spira il vento" l’éprouvent un peu, mais la prestation d’ensemble est à saluer. La mezzo-soprano Helen Charleston campe le double rôle de Rosmira et d’Eurimène avec une réelle conviction. La voix cependant malgré de belles vocalises manque un peu de corps et les graves trop souvent appuyés déséquilibrent la ligne de chant.
Le ténor Jacob Lawrence incarne avec saveur et un humour toujours juste le Prince Emilio, hâbleur et malheureux guerrier. Si la voix peut encore gagner en rondeur et en puissance, il séduit par la vaillance des moyens et les traits qu’il dispense. Le contre-ténor Alberto Miguélez Rouco, membre de l’Académie vocale de Philippe Jaroussky, possède une voix au timbre enjoué et d’une écoute délicate parfaitement adaptée au personnage tout de sensibilité d’Armindo. Dans le rôle d’Ormonte, le Capitaine des Gardes, le baryton Mathieu Walendzik impulse vie et caractère à ce personnage certes secondaire mais scéniquement presque toujours présent avec des moyens bien timbrés et assis.
A la tête de l’Orchestre en forme réduite des Arts Florissants, William Christie (les solistes chantent les parties chorales), se complait dans une attention de chaque instant de ses jeunes lauréats. Sa direction vive et sans langueur inutile, donne toute sa saveur à la musique de Haendel, toujours aussi inventive et ici colorée par l’emploi de trompettes et de timbales triomphantes.
Le public du
Festival réserve un accueil plus que chaleureux à tous les
interprètes de Partenope et notamment à cette pléiade de jeunes
chanteurs plus qu’en herbe désormais.