Benjamin Bernheim ouvre les festivités de Tous à l’Opéra 2022
Ce récital-dialogue s’appuie sur le second album du ténor, Boulevard des Italiens, paru tout récemment chez Deutsche Grammophon, gravé avec l’Orchestre du Théâtre Communal de Bologne dirigé par Frédéric Chaslin. Par ce disque, Benjamin Bernheim a souhaité rendre hommage aux compositeurs italiens particulièrement actifs en France depuis l’époque romantique, comme Gaspare Spontini ou Gaetano Donizetti qui écrivaient certaines de leurs musiques directement sur un livret français à l’instar de Giuseppe Verdi pour Don Carlos ou Jérusalem. Ce programme élaboré avec les conseils et l’appui d’Alexandre Dratwicki, Directeur artistique du Palazzetto Bru Zane, introduit par ailleurs des traductions de l’italien vers le français avec Tosca ou Madame Butterfly de Puccini (rappelant combien les opéras étrangers étaient chantés en langue française sur les scènes de l’hexagone jusque dans les années 1970). Il propose aussi des airs alternatifs ou totalement oubliés comme le magnifique récit de Giorgio tiré d’Amica de Pietro Mascagni, ouvrage créé en français à l’Opéra de Monte-Carlo en 1905.
Après un chaleureux mot d’accueil prononcé par Alexander Neef, Directeur de l’Opéra national de Paris, un jeu de questions-réponses s’instaure entre Benjamin Bernheim et Judith Chaine, rejoints ensuite par Alexandre Dratwicki et le jeune pianiste Félix Ramos qui accompagne le ténor. Ces échanges fructueux portant sur le style et les distinctions entre l’italien et le français, les ouvrages en eux-mêmes mais aussi sur les souhaits de carrière, pourront être découverts sur les ondes de France Musique le samedi 14 mai prochain à 20h, et via ce lecteur :
Le récital en lui-même reprend pour partie le programme du disque avec notamment l’air assez central de Licinius tiré de La Vestale de Spontini ou la cavatine de Fernand “Ange si pur que dans un songe” de La Favorite de Donizetti avec l’élégance du phrasé, la souplesse vocale et l’alternance des couleurs. Benjamin Bernheim se distingue par le soin constant porté à la prononciation la plus nette, ce sans aucune ostentation, mais plutôt porté par un naturel inné et une clarté de chaque instant, même dans les airs de forme plus héroïques comme avec la romance de substitution d’Henri à l’acte IV des Vêpres Siciliennes de Verdi. Entre l’extrait du rarissime Ali Baba de Luigi Cherubini (Air de Nadir), le récit et cavatine de l’acte de Fontainebleau du Don Carlos de Verdi ou l’air de Pinkerton tiré de Madame Butterfly de Puccini “Adieu séjour fleuri”, Benjamin Bernheim joue le grand écart vocal.
De fait, quelques tensions se font jour dans les airs plus larges comme celui des Vêpres Siciliennes ou provenant d’Amica, montrant les limites à ne pas encore franchir à ce stade, mais, en ajouts au récital, l’air de Des Grieux de Manon “En fermant les yeux”, chanté avec un raffinement constant et comme extatique, ou l’air fameux du Faust de Gounod “Salut demeure chaste et pure”, usent de la maîtrise de la voix mixte pour le plus grand bonheur du public présent.
Au piano, Félix Ramos, chef de chant en résidence à l’Académie de l’Opéra national de Paris, déploie un toucher d’une sensibilité particulièrement chaleureuse et d’une scrupuleuse attention de chaque instant à son partenaire : l’entente entre les deux artistes s’impose avec évidence.
Benjamin Bernheim reviendra en cet Opéra national de Paris sur la grande scène de Bastille quelques étages au-dessus, à partir du 28 juin prochain pour le Faust de Charles Gounod dans la mise en scène de Tobias Kratzer enfin présentée en public, après les problématiques de l’an dernier liées au Covid (notre compte-rendu à huis clos). Thomas Hengelbrock dirigera l’orchestre avec outre Benjamin Bernheim dans le rôle-titre, Angel Blue (Marguerite), Christian van Horn (Méphistophélès) et Florian Sempey (Valentin).