Mark Padmore et Simon Lepper, sombres mélodies d’hiver à La Monnaie
Tous deux issus de Canterbury, les solistes ténor et pianiste s’accordent, le temps d’un concert et d’un programme franco-anglo-saxon, autour des mélodies de Gabriel Fauré, Reynaldo Hahn puis Benjamin Britten, Samuel Barber, Ralph Vaughan Williams, Gerald Finzi. Un retour à la mélodie française, aux songs anglo-saxonnes, aux ballades sombres et mélodieuses de la solitude mais surtout aux velours rouges de La Monnaie, puisque le duo était déjà venu présenter un récital il y a maintenant quatre ans.
La Maison lyrique bruxelloise, contrainte récemment d’annuler les dernières dates de Norma et la Carmen (à cause du Covid en lui-même et de jauges minimales imposées) fait à nouveau résonner la voix en ses murs, la voix avec ses mots poétiques. « Le sens prime sur la pure virtuosité, le mot est plus intéressant que la note » affirme Mark Padmore et il le démontre avec un sens aigu de la diction, que le public de la maison avait déjà pu apprécier il y a quelques années dans The Rake's Progress de Stravinsky ou le War Requiem de Britten. Les mélodies et poèmes s’illustrent en musique à travers le clavier tempéré de Simon Lepper, ample et senti, mis en mot et musique par la voix de Mark Padmore.
Le naturel de sa voix avance dans les répertoires et les années avec un dépouillement mature et toujours une clarté du chant. Tant chantée, parlée que soufflée, discrète ou déployée dans le tragique, la voix du chanteur n’a que faire de la puissance pourvu que le souffle s’offre à l’égal du propos. Cette voix et de fait son auditoire élèvent le regard vers les cieux sombres et gris des mers houleuses, ou d’une nuit silencieuse comme celle dépeinte par Caspar David Friedrich. Les mots priment, certes, mais tout autant que leur justesse musicale aérienne ou creusée vers le baryton, ample, précise et claire.
La langue anglaise vient perler sur les flots du clavier de Simon Lepper qui, assidu dans l’accompagnement, déploie l’amplitude des mots par la note. Son support instrumental offre un solide soutien, une force et une tempérance dans la réponse au propos, avec son désespoir poétique.
L'auditoire encore soumis à la jauge de 200 personnes et à l'intimité de ce programme applaudit chaleureusement.