Le Chœur de l’Opéra de Nice chante Noël à l’Église Saint-François-de-Paule
C'est comme un « calendrier de l’Avent » musical qui est ici proposé en un soir avec une constellation de prières et de pièces sacrées du monde : de l’Italie (Rossini, Verdi, Donizetti) au Japon (Matsushita), en passant par la Norvège (Gjeilo) et l’Angleterre (Thompson), permettant également de révéler le travail de cet acteur-clé qu’est le chef de chœur, Giulio Magnanini, qui, la plupart du temps, reste en coulisse et n’en sort que pour recevoir sa part d’applaudissements lors des saluts.
Sa gestique est souple, aérienne mais solidement ancrée. Elle s’applique à dessiner les courbes sonores, particulièrement entrelacées dans l’écriture chorale, à les faire sortir et regagner le silence par d’élégants et minuscules rebonds. La figure principale des pièces sélectionnées est Marie, ce qui confère à leur assemblage la douceur d’une caresse comme la ferveur d’une prière. Les différents pupitres, tour à tour exposés, sont nimbés d’un halo sonore spécifique, ce qui est la marque du travail de coloriste effectué par le chef de chœur.
Le piano, immédiatement à sa droite, joue ici un rôle important, qu’il soit un accompagnateur discret, tel un grand diapason noir, ou un partenaire, quasi symphonique, dans les pièces les plus récentes. Tenu fermement par Valérie Barrière, il bénéficie de l’ondoiement acoustique de l’enceinte sacrée, tenue, quant à elle, tout au long de l’année liturgique, par les membres du monastère dominicain qui la jouxte immédiatement. La succession des pièces semble ouvrir et fermer l’espace sonore comme le ferait un accordéon, ce petit cousin des grandes orgues.
Les pupitres féminins, qui ouvrent le concert, composent une diaphonie frémissante et moussue. La division entre sopranos et altos est peu marquée dans ces pièces, d’où surgit, comme un rayon de lumière, la partie soliste de la soprano d’origine niçoise Mélissa Lalix. Elle prend soin d’amener sa voix en douceur sur le devant de la scène, de percer avec précaution la coquille de son pupitre, en prenant progressivement plus de présence. Son timbre d’encens est rendu aérien par les volutes délicatement sculptées de son vibrato (pour La Fede, La Speranza, La Carità de Rossini).
Les pupitres masculins, qui prennent le relais, diversifient les émotions et les couleurs mobilisées, en ajoutant à l’extase mariale un supplément de couleur et de drame. L’opposition est, également, plus marquée entre leurs deux pupitres. Les ténors y offrent les caractéristiques emblématiques qui font le sel de cette tessiture : un alliage de fragilité et de force, manifesté par les petits accents gutturaux qui leur permettent d’atteindre l’aigu.
L’ensemble des voix réunies maintient son travail de la justesse, graal précieux, grâce à une grande écoute mutuelle. Il est aidé par la gestique élancée du chef et l’intelligent soutien harmonique de la pianiste. Cette justesse est parfois malaisée à atteindre, dans un répertoire si délicat et avec une acoustique si généreuse, mais l’orientation globale de la formation chorale est ascendante, ce qui vient pallier le léger déséquilibre apporté par un pupitre de basses en grande forme.
Le public, qui occupe tous les bancs de l’édifice religieux, applaudit avec une ferveur retenue ce moment de méditation chorale. Entre pesanteur et élévation, incarnation et apothéose, il est placé au cœur de la célébration de Noël.