La Marseillaise pour tout le monde à l’Opéra National du Rhin
De manière à illustrer musicalement l’exposition consacrée à La Marseillaise par le Musée d’Art Moderne et Contemporain de la Ville de Strasbourg, l’Opéra National du Rhin a mis en place deux concerts participatifs, d’une heure à peu près, tenus le lendemain de l’inauguration. Le concept en est simple, mais efficace. Après l’audition de quelques pièces musicales reliées thématiquement et musicalement à l’hymne de Rouget de l’Isle composé dans la ville de Strasbourg, l’occasion est donnée au public de participer à la restitution de la mise en musique de La Marseillaise orchestrée par Berlioz.
Le concept de la soirée -ainsi que le protocole sanitaire à respecter- est présenté par le Directeur Alain Perroux en personne, visiblement ravi du succès de l’entreprise que manifeste le nombre important de Strasbourgeois ayant fait le déplacement. Le programme du concert fait ensuite l’objet d’une savante et pertinente présentation historique et musicologique.
Le programme présente cette Marseillaise (strasbourgeoise) sous différents jours. Le premier morceau joué par les musiciens de l’Orchestre symphonique de la HEAR (Haute École des Arts du Rhin) et le Chœur de l'Opéra National du Rhin, tous placés sous la direction de la cheffe Sora Elisabeth Lee, donne à entendre le chœur d’entrée des Troyens à Carthage de Berlioz, l’hommage chanté à la gloire de Didon. La pièce suivante permet au public de découvrir l’adaptation a cappella signée Zoltan Kodaly de La Marseillaise, chantée ainsi en hongrois. Fait suite à cette partie chorale le duo « Amour sacré de la patrie » extrait de La Muette de Portici d’Auber, dont le texte est une citation directe du sixième couplet de La Marseillaise (un morceau qui, le soir du 25 août 1830, enflamma les Libéraux et les Catholiques belges coalisés hostiles aux Hollandais, au point de les faire quitter le théâtre et de fomenter le mouvement qui devait conduire à la révolution belge et à l’indépendance du pays). Le morceau est vaillamment chanté par le ténor Sangbae Choï, issu du Chœur de l’Opéra National du Rhin, et le baryton Damien Gastl, soliste de l’Opéra Studio. Le premier fait valoir un organe souple et claironnant, le deuxième de belles couleurs martiales. Ce dernier revient dans la pièce de résistance du programme, La Marseillaise dans la version Berlioz, aux côtés de sa collègue mezzo-soprano Elsa Roux Chamoux, qui n’a aucun mal à emporter l’adhésion grâce à un instrument chaud et vibrant.
Un feuillet distribué au public signale les passages auxquels ce dernier peut prêter sa voix en se mêlant à celles du chœur : strophes 1 et 4 ainsi qu’à chaque reprise du refrain. Une courte répétition permet de mettre en place la prosodie de la strophe 4, moins connue du grand public. La strophe 7 est confiée quant à elle aux Petits chanteurs de Strasbourg ainsi qu’à la Maîtrise de l'Opéra National du Rhin. Les jeunes enfants, placés au premier balcon au plus près du plateau, se détachent par la justesse de leur chant et par la pureté de leurs timbres. Placé au fond de la scène, le Chœur de l’Opéra National du Rhin est plus en retrait, mais n’en chante pas moins avec conviction et autorité. Les jeunes musiciens de la HEAR font eux aussi preuve de lyrisme et de précision, sous la baguette ferme mais attentive de la cheffe Sora Elisabeth Lee.
Les interventions venues de la salle n’auront en rien déstabilisé les chanteurs et musiciens professionnels, dont la prestation reste irréprochable de bout en bout. Le bonheur ressenti par les membres du public devant (et dedans) ce type de manifestation participative témoigne de la réunion entre l’art savant et la culture populaire.