Arturo Chacón-Cruz importe le soleil du Mexique à L’Instant Lyrique Salle Gaveau
Contrairement à beaucoup de ses collègues, Arturo Chacón-Cruz est parvenu à fouler ces derniers mois plusieurs scènes lyriques majeures, comme Barcelone pour Les Contes d’Hoffmann d’Offenbach et tout récemment, Monte-Carlo pour Les Lombards à la première croisade de Verdi (notre compte-rendu).
Souhaitant partager avec le public français son bonheur de chanter et sa joie de vivre il a élaboré pour son récital de L’Instant Lyrique, un programme mêlant grands standards de la chanson nord-américaine et airs d’opéra. Doté d’un physique séduisant -un certain strip-tease intégral dans la production de Rigoletto au Festival d’Aix-en-Provence en 2013 a conquis les mémoires-, Arturo Chacón-Cruz se distingue en premier lieu par sa générosité vocale et la flamme qui emplit l’ensemble de ses prestations.
Malgré la seule présence dans la salle de quelques professionnels, des équipes techniques enregistrant le concert pour un public virtuel et de la maquilleuse, le ténor parvient à créer une ambiance de fête en invitant le soleil sous les ors de Gaveau. Ouvrant le programme par un électrisant Caruso de Lucio Dalla, il poursuit avec le célébrissime Torna a surriento pour aborder Leonard Cohen et son Hallejulah, What a Wonderful World immortalisé en son temps par Louis Armstrong.
Sortant de la partie plus spécifiquement crooner, le ténor se libère plus encore avec le fameux Besame Mucho enlevé avec maestria dans un accompagnement empli de fougue et de fureur établi tout spécialement pour le piano et le chanteur par Antoine Palloc. "Tu as joué cette partition mexicaine comme un vrai mexicain" lui lance un Arturo Charon-Cruz transporté ! Celui-ci retrouve le répertoire d’opéra avec notamment "Cielo e mar", air extrait de La Gioconda d’Amilcare Ponchielli ou en bis, "Nessun dorma" de Turandot. L’aigu ardent et fier prend appui sur un timbre chaleureux et une largeur vocale qui augure bien de l’avenir.
La soprano lyrique-léger Sara Blanch a amorcé une heureuse carrière débutée au Rossini Opera Festival de Pesaro en 2013 dans Le voyage à Reims (La Comtesse de Folleville). La voix ne manque pas d’atouts et semble s’épanouir dans un répertoire où l’aigu ou le suraigu, très faciles chez elle, trouvent au mieux à se montrer : Lucia, Fiorilla du Turc en Italie ou La Reine de la Nuit. Pour autant, son interprétation d’"O Luce di quest’anima" tiré de Linda di Chamounix de Donizetti, malgré ses envolées pyrotechniques vers les hauteurs, laisse un peu sur sa faim car le style n’apparaît pas encore très abouti, sinon suffisamment délié.
Dans le duo "Una Parola o Adina" de L'Élixir d'amour toujours de Donizetti, sous l’impulsion de son partenaire, elle trouve des marques nettement plus affirmées. Et surtout, dans l’air plus central de Lauretta de Gianni Schicchi de Puccini, "O mio babbino caro", la voix de Sara Blanch se pare de couleurs plus variées, plus mordorées. Un répertoire nouveau assurément à investir pour cette jeune interprète.
Le succès de la soirée ne serait rien sans la présence rayonnante d’Antoine Palloc au piano. Bien plus qu’un accompagnateur, il parvient à amplifier et magnifier tous les talents qui lui sont confiés.
Le prochain Instant Lyrique est programmé au 19 avril prochain avec Florian Sempey en vedette.