Opéra de Munich 2020/2021 : Kaufmann, Harteros et tous les autres recommenceront
Outre une pléthore de ballets et de concerts, ainsi qu’un généreux programme jeune public –y compris le traditionnel Hänsel und Gretel en décembre–, Bachler finira sur une note marquante en proposant six nouvelles mises en scène d’opéra et 30 productions reprises, auxquelles s’ajoutent encore sept autres reprises et deux premières lors du Festival d’été de 2021, notamment Tristan et Isolde par Krzysztof Warlikowski avec les prises de rôles tant attendues (et conjointes) de Jonas Kaufmann et Anja Harteros. La dernière saison du mandat Bachler reste largement fidèle à sa politique : commander de nouveaux opus, dénicher des perles rares et confier les classiques aux metteurs en scène controversés.
Die Vögel (Les Oiseaux) de Walter Braunfels connut sa création mondiale à Munich en 1920 et fêtera son centenaire cet automne dans la version de Frank Castorf (mise en scène) et Aleksandar Denić (décors), avec Ingo Metzmacher dans la fosse et Günter Papendell, Michael Nagy, Charles Workman, Caroline Wettergreen et Wolfgang Koch dans les rôles principaux de cette rarissime comédie d’après Aristophane.
Un autre grand dramaturge inspire l'événement inédit suivant : Timon of Athens (Timon d’Athènes), un « opéra en deux illusions » par Luca Francesconi sur son propre livret d’après Shakespeare. Le ténor britannique Toby Spence créera le rôle-titre sous la baguette de Kent Nagano dans la mise en scène d’Andreas Kriegenburg, dont sont aussi reprises les interprétations de La Reine des Neiges de Hans Abrahamsen (avec Barbara Hannigan et Rachael Wilson) et Wozzeck (avec Simon Keenlyside et Anja Kampe en Wozzeck et Marie).
Également conçu d’après Shakespeare, Lear de Reimann connaîtra les débuts maisons du metteur en scène suisse Christoph Marthaler, et Jukka-Pekka Saraste prendra la baguette en main pour diriger Christian Gerhaher, Angela Denoke, Ausrine Stundyte, Hanna-Elisabeth Müller en Lear et ses trois filles.
Après son double-opéra South Pole créé en 2016 (qui sera repris novembre prochain), le compositeur tchèque Miroslav Srnka présente "A Space Opera for Young Voices" (opéra spatial pour jeunes voix) intitulé Singularity avec justement de jeunes voix du studio maison et l’orchestre Klangforum Wien.
Les travaux de Dmitri Tcherniakov seront doublement présents. Sa version controversée des Carmélites de Poulenc avec Bertrand de Billy et un impressionnant plateau féminin (Ermonela Jaho, Doris Soffel, Adrianne Pieczonka, Jamie Barton et Christina Gansch) sera reprise en novembre, et en février il contre-signe Le Freischütz de Carl Maria von Weber : Antonello Manacorda y dirige entre autres Pavel Černoch (Max), Kyle Ketelsen (Kaspar), Golda Schultz (Agathe) et Anna Prohaska (Ännchen). La tradition allemande pré-wagnérienne est aussi représentée avec les Singspiele (opéras-comiques) de Mozart (La Flûte enchantée et L’Enlèvement au sérail) et le Fidelio pour les 250 ans de Beethoven façonné par Calixto Bieito, chanté par John Lundgren (Pizarro), Klaus Florian Vogt (Florestan), Anja Kampe (Leonore), Franz-Josef Selig (Rocco) et Emily Pogorelc (Marzelline).
En attendant le nouveau Tristan, les Wagnériens pourront profiter entre février et avril de Tannhäuser et Parsifal : le premier mis en scène par Romeo Castellucci et dirigé par Simone Young, avec un plateau vocal comprenant Anja Harteros en Élisabeth, Klaus Florian Vogt en Tannhäuser et Christian Gerhaher en Wolfram. Le second réalisé visuellement par Pierre Audi et Georg Baselitz, musicalement par Franz Welser-Möst conduisant Anja Kampe (Kundry), Simon Keenlyside (Amfortas) et Brandon Jovanovich (Parsifal).
Les opéras des "Strauss" sont fortement représentés : non seulement l’opérette La Chauve-Souris de Johann Strauss autour de la Saint-Sylvestre, mais aussi Richard Strauss avec Elektra incarnée par Iréne Theorin et René Pape, Ariadne par Robert Carsen (avec Camilla Nylund dans le rôle-titre), et La Femme sans ombre mise en scène par Warlikowski (réunissant sur scène Klaus Florian Vogt, Emily Magee, Michaela Schuster, Wolfgang Koch et Miina-Liisa Värelä), ainsi que la nouvelle production du Chevalier à la rose signée Barrie Kosky. Marlis Petersen passera du rôle de Sophie (confié à Katharina Konradi) à celui de la Maréchale, qu’elle interprétera aux côtés de l’Octavian de Samantha Hankey, le baron Ochs de Christof Fischesser et le Faninal de Johannes Martin Kränzle, sous la direction de Vladimir Jurowski.
Le 18 mars prendra donc fin l’ère de la mise en scène légendaire du Chevalier à la rose monté en 1972 par Otto Schenk, dont La Bohème (datant de 1969) restera toutefois dans la programmation et se réchauffera en décembre avec les voix d’Ailyn Pérez et Benjamin Bernheim en Mimi et Rodolphe. D’autres œuvres pucciniennes cette saison : Butterfly avec Alagna-Kurzak, la Manon Lescaut de Hans Neuenfels avec Sonya Yoncheva (rôle-titre) et Stefano La Colla (Des Grieux), dirigée par Marco Armiliato, comme aussi (en alternance avec Asher Fisch) la Tosca de Luc Bondy, avec une guirlande d’étoiles dans les trois rôles principaux : Anja Harteros, Anna Netrebko et Kristine Opolais / Stefano La Colla et Yusif Eyvazov / Bryn Terfel et Ambrogio Maestri. Finalement, le Trittico se produira en juin dans la mise en scène de Lotte de Beer, dirigé par Bertrand de Billy.
Giuseppe Verdi est aussi plus qu'à l'honneur : autant par de rares opéras, comme I Masnadieri (Les Brigands) et Les Vêpres siciliennes (dans l’interprétation disputée d’Antú Romero Nunes), que les plus joués. Željko Lučić incarnera les rôles-titres dans Macbeth (aux côtés de Liudmyla Monastyrska et Saimir Pirgu) et Rigoletto, où son adversaire sera interprété par Joseph Calleja (aussi dans Un Bal masqué avec Sondra Radvanovsky en Amelia). Dans La Traviata, Rosa Feola, Frédéric Antoun et Simon Keenlyside forment le trio vocal.
Côté belcanto, Pretty Yende interprétera au début de la saison Adina dans L’Élixir d’amour, et en mars la vision de Lucia di Lammermoor que propose Barbara Wysocka se réalisera par les contributions d'Antonino Fogliani (direction musicale), d’Adela Zaharia et de Pavol Breslik en Lucia et Edgardo.
Finalement, l’opéra tchèque sera honoré par la reprise de Rusalka avec Kristine Opolais dans le rôle-titre, et l’opéra hongrois par Judith, un double-programme Bartók conçu par Katie Mitchell, dont la seconde moitié est composée par Le Château de Barbe-Bleue avec Nina Stemme et John Lundgren.