Beethoven et Chailly acclamés à la Philharmonie
La direction de Riccardo Chailly, nerveuse et vive, conduit loin des a priori romantiques de l'ouvrage, en faisant ressortir de ces "majestueuses dimensions" (comme l'écrivait Berlioz en son temps) une simplicité bienvenue et féconde. En témoigne une salle concentrée et silencieuse qui ne s'autorise à tousser que pendant les pauses liant les mouvements. En témoignent surtout les applaudissements retentissants qui viennent saluer la performance du chef italien. Loin de la pompe, sa lecture personnelle de l'œuvre semble fusionner les pupitres mais avec un son d'une grande précision, à la fois dans l'intention et les contraintes rythmiques.
Magnifique et nouvelle rencontre avec le grand maestro #RChailly hier soir @philharmonie ! Très Impatients de la générale de ce soir @OrchestreParis @ch_OrchParis #Beethoven9 Concerts les 31/1 et 1/2 ! A ne pas manquer pic.twitter.com/YSOT1hkM9n
— Chanteurs du Chœur de l'Orchestre de Paris (@ch_OrchParis) 30 janvier 2020
Outre la beauté des instruments, c'est en effet l'impeccable coordination entre la demande du chef et la réponse immédiate des pupitres -comme si un fil invisible les liait- qui suscite l'émotion. Le Chœur de l'Orchestre de Paris fait lui aussi forte impression grâce à une diction soignée (très théâtrale, ce qui sied à l'Hymne de Schiller), malgré un son un peu terne de la part des pupitres masculins. Leurs collègues féminines sont de grande tenue : longueur de souffle, rondeur du son commun, richesse des harmoniques.
À ces voix s'ajoutent celles des quatre solistes pour le finale. La soprano Christina Landshamer possède un instrument brillant et parvient à se jouer des difficultés de la partition avec élégance. Si les derniers aigus paraissent un peu poussifs, ils ne sont jamais émis avec force et l'homogénéité du timbre traverse la totalité de ses registres. Gerhild Romberger, en retrait comme le veut la partition, donne à entendre un timbre rond et sombre qui se mêle pleinement avec celui de sa collègue allemande. Toutefois, son mezzo est souvent couvert par l'orchestre dans les moments d'exposition.
Steve Davislim a pour lui un timbre clair, voire claironnant lorsqu'il déclame "Froh, wie seine Sonnen fliegen" (Joyeux, comme ses soleils volant) mais il est parfois couvert par l'orchestre dans le registre aigu. Musical, il évite l'écueil d'une vaillance excessive qui l'isolerait du quatuor. La basse Dimitry Ivashchenko enfin possède un médium noir et riche particulièrement apprécié dans son solo "O Freunde, nicht diese Töne!" (Ô amis, pas de ces accents !). Le registre aigu, par contre, perd en rondeur pour devenir un peu sourd. L'ensemble du quatuor formé est, lui, d'une grande maîtrise, très réactif aux demandes du chef.
Après une heure et demie intense, tous les musiciens sont acclamés.