L’Instant lyrique tout en délicatesse de Cyrille Dubois à l’Éléphant Paname
Le
répertoire choisi est interprété comme
un grand crescendo
expressif. La
délicatesse requise pour chanter les mélodies françaises et faire
entendre la beauté des poèmes de Verlaine avec une articulation
modèle, est suivie par la
douceur romantique des
Lieder
de Liszt. Enfin, la hardiesse des arias
italiennes
marque l’apothéose expressive du récital avec Donizetti, Bellini et Rossini.
Ce choix entonné à l’occasion du 48ème Instant Lyrique de l’Éléphant Paname, et le premier immortalisé par France Musique (qui le retransmettra le 25 décembre) se caractérise par la richesse mais également la complémentarité vocale. Cyrille Dubois démontre et déploie sa virtuosité, sa capacité à passer d’un registre intime à un registre opératique sans faiblir, avec force nuances et liberté vocale. En effet, lors des reprises de thèmes, le ténor s’émancipe souvent du carcan des partitions pour proposer une interprétation toute personnelle des airs, avec ornements, fioritures et des élans vocaux s’élevant au-delà des nues. Le lyrisme de ténor (à l’italienne) est ainsi au service d’une couleur de haute-contre (typiquement française).
La première partie du récital, consacrée à Fauré est placée sous le signe de l’extase évoquée à de nombreuses reprises dans le texte et suggérée par la voix. Chaque mélodie est entonnée avec une légèreté agréable, la subtilité des sons est mise en valeur par l’ouverture des voyelles, notamment en fin de phrases, qui renforce l'impression de délicatesse. Le legato de la voix et les ondulations du phrasé suivent le piano dont les arpèges se succèdent comme le courant de l’onde. Le pianiste Tristan Raës montre alors la suavité de son jeu, dans son évocation de la nature et des affections humaines. Les airs de Liszt qui suivent permettent l’expansion d’un vibrato plus soutenu, le premier chant O Lieb!, (titre du disque enregistré cet automne par le duo), est la version chantée du célèbre Liebestraum (rêve d'amour). À travers le répertoire de Liszt, plus romantique et dense émotionnellement, le duo se fait duel avec des moments de questions-réponses piano-voix. Le ténor semble alors de plus en plus habité par la musique, yeux fermés et poings liés, il inspire lorsque le piano s’illustre, puis s’illustre à son tour, avec aisance, gestion parfaite de son air et trilles jusque dans les nuances les plus pianissimo.
Pour la seconde partie consacrée au répertoire italien, le ténor adopte une attitude plus théâtrale et fait entrevoir l’éventail de ses possibilités vocales dans la vigueur lyrique exigée par le bel canto. L’arrangement pour piano des grands airs accompagnés par l’orchestre diminue certes la dimension grandiose des arias. Néanmoins, le duo tente de dépasser les bornes du piano-voix en enrichissant les lignes musicales, par des ornements et vocalises. Cyrille Dubois improvise avec facilité des lignes complexes, comme il affirme des accents d’amour impétueux. La justesse est à toute épreuve, aucun glissando n’est nécessaire pour atteindre les notes les plus hautes, en vibrant d’ondulations précises.
Couronné de succès, le duo offre pour bis « Ô quand je dors » de Liszt, comme pour souhaiter bonne nuit au public. Mais celui-ci, récalcitrant, n’écoute pas l’appel du sommeil, et sous des applaudissements qui ne cessent de retentir, le Directeur artistique de L’Instant lyrique, Richard Plaza enjoint le duo à interpréter un dernier caprice « Ah mes amis, quel jour de fête » sommet sautillant et plein de joie de La Fille du Régiment de Donizetti.
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