Mahler Bohémien : Troisième Symphonie à la Philharmonie de Paris
Ce concert est placé sous le signe de la Bohême, région historique de la Tchéquie à laquelle sont liés les interprètes du soir : l'Orchestre symphonique de Bamberg est fondé en 1946 par les musiciens du Théâtre allemand de Prague expulsés de la Tchécoslovaquie après la Seconde Guerre mondiale, tandis que le chef principal actuel de cet ensemble est justement un Tchèque, Jakub Hrůša. Gustav Mahler, lui-même, est originaire de Bohême (ville de Kaliště). Le lien germano-slave se renforce encore ici par la présence de la mezzo Bernarda Fink, née en Argentine mais de parents slovènes.
Le mélange de ces sensibilités se traduit dans l'approche artistique du chef. Le lyrisme du sixième mouvement, voué à l'amour, fait ainsi surgir de l'orchestre un jeu fort expressif où les cordes transmettent le sentiment d'affection voulu. D'autant que le son proprement germanique ne manque pas de se faire entendre, notamment dans le premier mouvement, avec les cuivres puissants (surtout les trombones et les cors) et de nouveau les cordes (l'unisson des violoncelles et contrebasses). La précision de Hrůša se manifeste par ses gestes et sa volonté d'exprimer toutes les facettes de cette première partie de la symphonie, nommée « Cortège de Bacchus ». Une « entrée d'été » qui révèle une diversité joyeuse carnavalesque (dans ce début de la saison du carnaval où notre série #AirduJour vous accompagne), parmi cette partition si riche en caractères.
Sur le plan vocal, l'interprétation de la mezzo-soprano Bernarda Fink reste éloignée de l'atmosphère songeuse du quatrième mouvement, de la douleur et de la joie gravées dans le texte, en dépit de sa maîtrise de l'allemand. Bien que les chefs confient assez souvent cette partie de soliste aux mezzo-sopranos, le timbre de Fink paraît très aigu et clair pour ce rôle d'alto. Ce manque d'ombrage du timbre ne l'empêche pourtant pas de filer la longueur du souffle dans un mouvement lent. Cela étant, sa posture scénique est dépourvue d'expression théâtrale. Elle peine d'ailleurs à se distinguer devant cet effectif orchestral massif, ce qui est le cas également pour le Choeur de femmes et d'enfants de l'Orchestre de Paris dans le cinquième mouvement. Les choristes sont néanmoins appréciés pour leur unisson avec les cloches placées en haut à l'arrière-scène, dans l'hymne du Cor merveilleux de l'enfant. Cependant, leur prononciation du texte n'est pas vraiment compréhensible. Dans le dialogue entre chœur et soliste, la mezzo-soprano manifeste de la souplesse et une aptitude à changer les tempi tout en gardant la justesse dans l'intonation, sans rien perdre de précision rythmique. Sa bonne compréhension avec le chef rappelle que les deux associés sont des habitués et grands connaisseurs du répertoire mahlérien.
Le public de la Grande salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris applaudit chaleureusement les interprètes, surtout les solistes qui sont ovationnés.
Tonight, a great concert at the #philharmoniedeparis with the #bambergersymphoniker conducted by #JakubHrůša , and with the children and women choir of the Orchestre de Paris ! #Mahler3 pic.twitter.com/nIVe5ohtka
— Helene M.A. (@helene_mahln) 15 février 2019