Stabat mater à Bordeaux : du chœur à l’ouvrage !
Pour la Fête de la musique, le Chœur de l’Opéra de Bordeaux se produit en concert à l’Auditorium. C’est lui la star de la soirée. Au point que le nom de l’œuvre jouée n’apparaît même pas sur la couverture du feuillet distribué en salle aux spectateurs : il s’agit du Stabat mater de Rossini dans une réduction pour deux pianos. Ce sont donc les quatre mains de Martine Marcuz et Stéphane Trébuchet qui accompagnent le concert. Bien sûr, ils ne peuvent faire oublier la richesse et la subtilité de l’orchestration rossinienne. Parfois pesant, l’accompagnement bénéficie heureusement de la complicité des deux interprètes qui offrent une interprétation cohérente.
Quatre solides solistes servent l’œuvre. Chez les femmes, la soprano Alexandra Marcellier dispose d’une voix verdienne aux aigus ronds et au médium charpenté. Elle varie les couleurs depuis des piani bien amenés et esthétiques jusqu'à des élans dramatiques et volumineux aux notes piquées propres et percutantes. Adriana Bignagni Lesca, indiquée mezzo-soprano, offre plutôt une voix de contralto, large et fort vibrée. Ses saisissants graves poitrinés sont épais et caverneux, appuyés sur un long souffle. Ses aigus sont en revanche forcés dès qu’ils gagnent en volume.
Du côté des hommes, le ténor Camille Tresmontant affiche un timbre de platine : à la fois mat et lumineux. Légèrement barytonnant dans le médium il n’en dispose pas moins d’aigus bien envoyés. Dans son Cujus animam, il gagne en expressivité dès qu’il parvient à se détacher de sa partition ou lorsqu’il allège son chant pour se faire suave, travaillant alors avec plus de soin son articulation. Si les vocalises restent rigides, il découpe parfaitement son phrasé pour y placer des respirations courtes qui lui permettent de construire de longues lignes sculptées. La basse Antoine Foulon dispose d’une voix bien assise aux hauts médiums clairs et projetés avec aisance. Moins à l’aise dans les graves, il y offre un timbre agréable, mais une émission plus étriquée. Son assurance lui permet toutefois de ressortir dans les ensembles où il apporte une énergie communicative.
Le Chœur se montre d’une grande précision rythmique et d’une homogénéité exemplaire. Les basses résonnent d’emblée, déployant leurs harmoniques avec solennité et formant un socle depuis lequel s’envolent les voix aériennes des ténors et des pupitres féminins. Avec musicalité, l’ensemble sait se faire aussi bien enveloppant et caressant que puissant et franc. L’ensemble est dirigé par Salvatore Caputo. Avec beaucoup d’humour, il revient à la fin du concert annoncer au public la victoire de la France en Coupe du Monde de football face au Pérou (événement à cause duquel, sans doute, la salle n’est pas pleine). Il propose en bis une interprétation du Quando corpus a capella, dont il souligne la difficulté et le plaisir qu’ont les artistes à en faire cadeau au public : ce dernier récompense cet effort et une exécution enthousiaste et précise du numéro, par de chaleureux applaudissements.