Les amateurs de French Kiss comblés au théâtre Trévise !
Le spectacle French Kiss, les sopranos de Broadway s’ouvre par un prélude instrumental dans lequel s’entendent plusieurs motifs de comédies musicales célèbres et qui permet de découvrir les deux musiciens qui accompagneront la chanteuse toute la soirée : les excellents Kevin Amos (pianiste, accompagnateur, arrangeur), et la violoncelliste Jennifer Hardy (membre de l’Orchestre Les Siècles, se produisant régulièrement avec Les Musiciens du Louvre, Le Concert d’Astrée ou encore Le Palais Royal). Cette page instrumentale permet à Fleur Mino de faire son entrée et d’enchaîner avec le « Tonight » de West Side Story, duo habilement transposé en un air pour Maria sans Tony ! Le public découvre alors une belle jeune femme blonde, rayonnante, vêtue d’une robe rose accentuant un côté éternelle adolescente (parfaitement de mise pour les rôles de Maria ou de Wendy dans le Peter Pan de Bernstein), qu’elle troquera un peu plus tard pour une superbe robe rouge, plus appropriée aux pages parfois un peu plus graves chantées en seconde partie de soirée (les deux airs de Julie dans le Carousel de Hammerstein) ou au « Glitter and be gay » de Cunégonde, la femme faussement fatale du Candide de Bernstein. Les pages vocales sont entremêlées de morceaux instrumentaux (transpositions très réussies pour piano et violoncelle du « Memory » de Cats ou du « Could be, who knows » que chante Tony dans West Side Story) ou de courtes interventions parlées de Fleur Mino qui présente les pages qu’elle s’apprête à chanter, fait part de ses coups de cœur (Carousel de Hammerstein est sa comédie musicale préférée), donne des conseils au public (incité à chanter « I feel pretty » tous les matins), commente les pages qu’elle interprète – lorsqu’elle évoque, par exemple, la musique de « If I loved you » (Carousel), infiniment plus éloquente que les paroles.
Le programme est habilement composé, faisant alterner les tubes attendus avec quelques pages plus rares. La voix de Fleur Mino est adaptée à ce répertoire : légère, disposant d’un bagage technique lui permettant de jolies tenues de souffle, quelques aigus pianissimo, et même de venir à bout du redoutable air de Cunégonde dans lequel s’illustrèrent les plus grandes (June Anderson, Natalie Dessay, Sumi Jo, Diana Damrau). Une diction claire rend intelligibles tous les textes. Certaines couleurs légèrement acidulées de la voix se marient par ailleurs très bien avec les sonorités chaudes et rondes du superbe violoncelle de Jennifer Hardy, et le trio formé par les trois artistes fonctionne musicalement parfaitement, chacun étant, en termes de rythmes, de lignes mélodiques, de couleurs, complémentaire de l’autre.
Enfin, la plus grande réussite du concert réside peut-être dans l’ambiance créée par les artistes. Ce genre de récital peut susciter deux extrêmes : un concert trop guindé dont la perfection classique ne serait pas de mise dans ce répertoire, ou au contraire un cabotinage excessif pouvant parfois confiner à une certaine vulgarité. Fleur Mino ne tombe jamais dans l’un ou l’autre de ces extrêmes. Sans doute aidée en cela par le metteur en scène Stéphane Ly-Cuong, qui signe un spectacle sobre (avec peut-être un emploi un peu excessif de fumigènes !), elle offre un récital coloré, amusant, de bon goût et communique le plaisir qu’elle éprouve à chanter – à tel point que le public (qui réserve aux artistes un accueil chaleureux) laisse échapper un petit soupir de dépit lorsqu’il se rend compte que la soirée touche à sa fin…
Pour les amateurs de comédies musicales américaines, de spectacles musicaux et de petits théâtres sympathiques, trois autres soirées sont prévues : les mercredis 14 février, 21 mars et 11 avril.