Gaëlle Arquez et Jean-Sébastien Bou, Duo à la française
Dès les premières notes de « l'Air de Clytemnestre », extrait d'Iphigénie en Aulide de Gluck, Gaëlle Arquez (à retrouver ici en interview) interpelle son auditoire par sa présence magnétique et sa densité artistique. La voix est magnifique, pleine, extrêmement juste, avec un timbre chaud et une incroyable projection. Sa « Séguedille » de Carmen (dont elle a pris le rôle cette saison à Francfort) est des plus détonantes. Elle incarne à merveille la sulfureuse héroïne de Bizet, avec tout ce qu'il faut d'impertinence et de légèreté. Un tempérament fort que le public retrouve dans l'air « Oh ! La pitoyable aventure ! », extrait de L'Heure Espagnole de Maurice Ravel, où la mezzo-soprano arrive à faire surgir tout le comique de la situation ainsi que la frustration de Conception qui n'arrive pas à obtenir ce qu'elle veut de ses deux prétendants.
Gaëlle Arquez (© Eric Dahan)
Dans un registre beaucoup plus dramatique, « l'Air des Lettres » est tout à fait saisissant. Gaëlle Arquez, toujours irréprochable techniquement, y incarne une très convaincante Charlotte (autre prise de rôle récente) relisant les lettres tourmentées du jeune Werther. Elle parvient avec la plus grande facilité à passer par tous les différents états psychologiques qu'implique cet air et impressionne dans l'équilibre et l'entente qu'elle arrive à trouver avec le très fin Mathieu Pordoy, qui fait jaillir de son piano tout l'orchestre de Massenet. Le pianiste, en plus d'accompagner avec une grande justesse les chanteurs, propose quelques œuvres instrumentales, avec notamment la transcription pour piano seul du Ballet des ombres heureuses de Gluck. Un moment d'une grande poésie.
Jean-Sébastien Bou (© Vincent Pontet)
Le baryton Jean-Sébastien Bou (dont l'interview à Ôlyrix est disponible ici) est assurément l'une des voix les plus en vue de la scène parisienne. Bien que fort sympathique et agrémentant le récital de quelques blagues et moues comiques, le chanteur donne une prestation en demi-teinte. Son « Air d'Oreste », extrait d'Iphigénie en Tauride de Gluck, semble fade et surtout souffre d'un manque de gestion de l'équilibre avec le piano, un problème que l'on retrouvera aussi sur Don Quichotte à Dulcinée de Maurice Ravel. Le chanteur est beaucoup plus à son aise sur « l'Air de Zurga » extrait des Pêcheurs de Perles de Bizet, mais donne surtout, avec Gaëlle Arquez, un magnifique « Duo de la Fontaine », extrait de Pelléas et Mélisande. Auréolé du succès acquis lors de la production de cette œuvre au mois de mai dernier au Théâtre des Champs Elysées (dont nous vous avions rendu compte), le chanteur impressionne par sa capacité à projeter le spectateur, sans décors et mise en scène, dans l'univers fantastique de l'œuvre de Debussy. Assurément l'un des plus beaux moments de ce concert.
Les deux artistes, rappelés par deux fois sur scène, viennent interpréter le très espagnol Boléro « El Desdichado » de Saint-Saëns, et surtout le fameux duo de l'âne « De ci, de là », extrait de l'opérette Véronique d'André Messager qui clôt ce récital de la plus pétillante des manières !
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