Le Souffle de l'âme : Thierry Escaich gravé par le Chœur Dulci Jubilo
Ce nouvel enregistrement du label Anima Nostra présente un dialogue musical envoûtant entre les œuvres du compositeur Thierry Escaich et les improvisations de l'organiste Thomas Ospital, titulaire du grand orgue de Saint-Eustache. Le Chœur de chambre Dulci Jubilo, dirigé par Christopher Gibert, y appose un souffle délicatement animé. "Le Souffle de l'âme" renvoie ainsi à celui du c(h)œur, de l'orgue, tout en étant une référence directe au Magnificat qui conclut cet album (et dont le texte commence ainsi : "Mon âme exalte le Seigneur"). Le programme se déroule ainsi, dans les inspirations des mélodies sacrées latines se répondant.
L'album s'ouvre par les Trois Motets pour 12 voix mixtes et orgue dont le premier crée un paysage musical délicat, combinant d'emblée les harmonies mystérieuses du chœur et de l'orgue. Le texte d'Alain Suied sur Le Pays perdu devient parfois presque secondaire, mettant en valeur l'émotion des harmonies du chœur comme de l’orgue, alliant graves profonds et aigus chatoyants. Le dialogue musical se déploie ensuite, expressif et figuratif jusqu'en une danse rythmée où le Chœur de chambre Dulci Jubilo allie précision vocale et une intensité presque opératique.
Pour vivre l’expérience d’une œuvre totale, ces Trois Motets ont inspiré la chorégraphe-danseuse Flora Schipper et le réalisateur Elliot Storey pour une œuvre cinématographique en trois tableaux, offrant une dimension visuelle tout aussi poétique et saisissante :
Le voyage et le rituel se poursuit, dans l'apparente évidence d'une improvisation, dans la riche complexité des structures harmoniques, dans les dialogues entre les voix et les doigts (ceux de Thierry Escaich explorant l'antienne grégorienne et Saint Thomas d'Aquin dans Évocation IV). Les graves répondent aux graves, dans des structures denses et cohérentes.
La Messe Romane offre une riche palette sonore, démontrant sa puissance tout en apportant des moments de douceur. Au milieu de la messe, l'organiste Thomas Ospital offre une improvisation apaisante, moment suspendu dans cet album qu'il sait nourrir d'images évocatrices et variées et déployer dans leur puissante densité. La prise de son minutieuse et équilibrée permet d’apprécier les couleurs et nuances subtiles, ses variations délicates ou puissantes. Les harmonies sont ainsi exécutées avec clarté tandis que l'écriture rythmique reste très précise.
Le Souffle de l'âme s'offre ainsi en une expérience qui marie la musique et la spiritualité d'une écriture musicale et de ses interprétations aussi libres que maîtrisées : une plongée profonde dans une expérience auditive captivante.