L’Amour vainqueur, opérette pour jeune public d’Olivier Py
S’inspirant du conte Demoiselle Maleen des frères Grimm, le dramaturge et metteur en scène Olivier Py imagine une courte pièce d’une heure alliant théâtre et musique pour les spectateurs de plus de 6 ans. Cette œuvre créée en 2019 au gymnase du lycée Mistral d’Avignon, et dont la captation a été mise en ligne lors du premier confinement, poursuit sa tournée en France et en Suisse Romane.
Tout a été imaginé pour permettre à l’œuvre d’être montée avec un minimum de moyens, la scénographie de Pierre-André Weitz (qui signe également les costumes et les maquillages des visages en blanc) se satisfaisant d’une scène presque vide avec des décors en toile et quelques rares accessoires. Les lumières, souvent très crues, réalisées par Bertrand Killy, permettent de créer avec simplicité et efficacité les atmosphères suggérées par les décors et la mise en scène d’Olivier Py. Celui-ci, en réécrivant le conte des frères Grimm (autour d’une Princesse rebelle et combattive, d’un Prince désespéré et malheureux, d’un Général égoïste et manipulateur) invite avec une certaine simplicité à réfléchir autour de plusieurs sujets qui restent toujours d’actualité, tels que la guerre, les violences humaines, le pouvoir du théâtre et de la musique, la beauté, l’amour, le désir et le destin. Le dramaturge, avec l’aide d’Antoni Sykopoulos, compose les chansons qui soutiennent les monologues des personnages et rythment ainsi cette opérette-conte initiatique.
La Princesse, seule voix féminine, est confiée à la soprano Clémentine Bourgoin qui lui prête son timbre clair parfois acidulé, aidé d’un vibrato un peu serré dans les médiums mais particulièrement souple dans les aigus, offrant ainsi notamment son air touchant “La vie s’en va à tire d’aile”. Elle joue également quelquefois des effets et mélodies de son violoncelle. Le prince est interprété par Pierre Lebon, qui incarne aussi la laide mais hilarante Fille de vaisselle, avec une indéniable implication théâtrale. Sa voix sert avant tout la déclamation de son texte et son jeu scénique, tantôt tendre ou désolé, tantôt comique, à l’honneur aussi de plusieurs airs, comme le naïf mais charmant “Je rêve d’un monde meilleur”. Il manifeste aussi quelques bases agiles de danseur et accompagne ses partenaires du piano ou de son accordéon pour le duo « gai et triste » de la Princesse et du Jardinier (“On a trouvé moyen d’éteindre le soleil”). Ce dernier est incarné par Flannan Obé, comédien désopilant, danseur amusant pour un duo chorégraphié avec la Fille de vaisselle (Pierre Lebon) mais également très appréciable ténor, à la voix souvent lumineuse mais parfois nasale et également chaleureuse, jouant avec aisance, voire malice, des différents atouts de sa palette de timbres.
Antoni Sykopoulos ne peut montrer ses éventuels talents à la flûte à bec car il est constamment interrompu par les effets comiques. Par contre, les arrangements musicaux qu’il a composés lui permettent d’accompagner au piano avec clarté et sensibilité, à l’opposé des personnages qu’il incarne quand il ne joue pas de la musique : le méchant Général et le cupide Roi, père de la Princesse. Il fait ainsi entendre sa voix chaude et ronde de baryton, avec un soin attentif au texte, se montrant même effrayant.
Après un finale digne des conclusions joyeuses et traditionnelles à l’opérette, le public applaudit avec enthousiasme ce moment riant et touchant, frappant chaleureusement des mains sur la conclusion donnée en bis : un enthousiasme ressenti dans cette captation audiovisuelle, à laquelle la tournée du spectacle invite le public et encore récemment à Limoges qui poursuit son partenariat avec Olivier Py (dont nous avons rendu compte dans un Requiem pour le Faust nocturne annulé durant le confinement et dans le cadre de nos présentations des programmes et saisons limougeaudes).