De derrière le rideau : C’est ça la politique ?
Qu’est-ce qui pousse nos hommes politiques à la surenchère permanente ? Et ce quels que soient leurs sujets de préoccupation. L’évolution de nos médias vers une immédiateté de l’information et de son traitement et donc du commentaire et de la réaction, pousse les uns et les autres à être sans cesse dans les starting blocks, prêts à dégainer la petite phrase qui fera le buzz. Les stylos, les micros et les caméras suivront à coup sûr et relaieront à l’envi les quelques mots qui n’auront d’autre but que de placer ou replacer leur émetteur dans la course pour la prochaine élection.
Navrant ? Pas sûr ! Provoquer des réactions en chaine permet, sans aucun doute, de faire jaillir des idées. C’est le principe du brainstorming public, d’un concours de créativité qui n’en a que le nom. Les contributions se télescopent, les internautes se déchainent sur les réseaux sociaux et il ne reste plus qu’à faire le tri des meilleures propositions pour faire avancer la machine. L’ensemble des acteurs de ce petit jeu politicien, si si politicien, a d’ailleurs créé, qui son blog, qui son site internet, pour être à tout moment capable de réagir, dans la minute, à l’initiative d’un ami ou d’un adversaire, qu’il faut quoiqu’il arrive mettre à terre. Dans ce petit monde très fermé et formaté, c’est le jeu de l’ego permanent, comme avec nos enfants ! Et comme toujours dans notre beau pays, nous sommes pour ceux qui sont contre, et contre ceux qui sont pour ! L’essentiel n’étant pas trop ce que l’on dit mais comment on le dit. Comment faire mouche sans erreur et ne pas faire mentir Edmond Rostand quand il fait dire à Cyrano : « et à la fin de l’envoi, je touche ! ». En l'occurrence, à la fin de l’envoi du courriel, du sms, du tweet ou du post, supposés être plus tranchants qu’une épée. Mais tout le monde n’est pas Edmond Rostand et beaucoup trébuchent sur le pavé qu’ils destinaient à la mare. Et on dément et on se contredit, sans aucun état d’âme, l’important étant que jamais le jeu ne s’arrête, pour rester dans la partie et continuer d’exister.
Et pour cela ils sont prêts à s’allier avec tous ceux qui peuvent leur servir de tremplin, même si c’est avec le diable. Finalement, l’immense Jean-Philippe Rameau, en créant Platée, n’a pas fait autre chose que de mettre en scène avec génie une manipulation destinée à châtier une jalousie par trop dérangeante, celle de Junon, la femme de Jupiter. L’héroïne, la reine des marais, va faire les frais de ce concours de méchancetés, voyant ses traits quelque peu disgracieux vantés jusqu’à l’amour, victime de son désir de paraitre et de sa vanité adjacente. La cruauté peut ne pas avoir de limite quand il s’agit de faire taire la jalousie de l’autre. L’abandon de Platée est le prix à payer pour que les époux, Jupiter et Junon, retrouvent le chemin de la félicité. Alliance et contre-alliance constituent le lot de consolation de ceux qui manipulent et sont manipulés. Au prix de quelques morts. Ah, politique politicienne quand tu les tiens !
Retrouvez la précédente chronique de Philippe Marigny : Le réchauffement climatique ? Brrrrr !
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