Alain Surrans : « Mon travail est un rêve »
Alain Surrans, la crise économique a secoué votre institution l’an dernier : comment la situation évolue-t-elle aujourd’hui ?
Pour nos élus, les institutions lyriques sont un peu mystérieuses : il y a tant de corporations ! Cela provoque de l’émerveillement mais c’est difficile à comprendre. Nous devons faire de la pédagogie pour leur faire comprendre les mécanismes propres à nos métiers. L’inflation, et les mesures sociales qui s’y sont ajoutées, ont conduit toutes les maisons d’opéra au bord de l’asphyxie, avec des coûts qui augmentaient et des subventions qui stagnaient. Il y avait un déséquilibre entre ce qu’on appelle le Théâtre en ordre de marche [c’est-à-dire les coûts fixes du théâtre, ndlr] et la production qui est la raison d’être de nos institutions. Depuis mon arrivée, l’activité de production et de diffusion a ainsi vu ses crédits baisser de 25%. Ce travail de pédagogie nous a pris toute l’année 2023 : mon adjoint, Thomas Pialoux, a eu un rôle très important dans ce travail. Nos tutelles ont ainsi pu mieux saisir les enjeux et ont permis un rattrapage, en une seule année, de la moitié du retard que nous avions. Cela représente +200.000 € d’Angers Loire Métropole, +100 K€ de Nantes Métropole, +15 K€ de la Région et +200 K€ de l’État. Cette convergence de toutes les collectivités nous permet de sortir de l’ornière en consolidant un nouveau socle budgétaire. Des pistes plus techniques pourraient nous aider à combler le reste du retard. Par exemple, financer en partie les créations sur des crédits d’investissement permet de soulager ces coûts, nous allons également désormais être assujettis à la TVA, ce qui nous permettra de la récupérer, avec un différentiel favorable entre la TVA qu’on paie, à 20%, et la TVA qu’on encaisse à 5,5% ou 2,1%. Nous allons désormais pouvoir relancer l’activité : ce sera le travail de mon successeur car je quitterai mes fonctions en janvier 2026.
Vous êtes au même niveau d’activité que l’an dernier (quatre titres lyriques). Or, vous disiez alors être en-dessous de la ligne de flottaison : cela vous semble-t-il préoccupant pour l’avenir ?
Nous ne sommes en effet pas encore revenus à un niveau d’activité satisfaisant, qui nécessiterait une production supplémentaire. Je dois d’abord reconstituer notre fonds de roulement, mais nous devrions y arriver à partir de 2026.
Où en est le projet de devenir Théâtre lyrique d’intérêt national (qui remplaçait le projet de devenir Opéra national) ?
Ces labélisations sont fonction du projet de direction. Comme j’arrive bientôt au terme de mon mandat, c’est un sujet qui incombera plutôt à mon successeur, qui aura ainsi le temps de programmer sereinement sa première saison.
Comment avez-vous construit votre saison 2024/2025 ?
Comme d’habitude, j’ai commencé par décider des grandes productions : La Traviata et La Flûte enchantée. Je savais que je ne pourrais pas faire de production de la dimension du Béatrice et Bénédict de Berlioz de cette saison : nous ferons donc deux versions de concert. Nous aurons comme d’habitude deux projets menés avec Rennes : la création de La Falaise des lendemains et Close up, un projet musical et chorégraphique dont nous sommes coproducteurs. Nous aimons nous retrouver sur des projets de création ou de recherche. Il y a enfin deux projets qui nous sont propres : Il piccolo Marat de Mascagni sur un épisode de la Terreur à Nantes. Nous portons également seuls la Messe pour une planète fragile avec la Compagnie Frasques, un oratorio mis en scène.
Vous lancez en effet votre saison avec une rareté : Il piccolo Marat de Mascagni. Comment avez-vous découvert cette œuvre ?
Je connaissais cette œuvre de réputation, mais je ne l’avais jamais entendue avant de la découvrir à Livourne, la ville natale de Mascagni, qui en a monté une production.
Je me suis rendu compte que c’était de la formidable musique : c’est une partition extrêmement puissante. En France, nous ne connaissons et ne jouons que quelques opus du répertoire vériste. Or, l’étiquette vériste est appliquée de manière trop simpliste à Mascagni. Il était très ami avec Puccini : tous les deux procédaient de la même manière, recherchant d’abord un sujet sans a priori esthétique. Ce Piccolo Marat est ainsi un ouvrage très symbolique. Aucun des personnages n’a de nom : ils sont appelés par leur fonction (un marin, un soldat, etc.). L’œuvre est ainsi un étrange mélange, passionnant. C’est un opéra paroxystique sur une histoire de sauvetage, qu’on peut rapprocher de celle de Fidelio de Beethoven ou Les deux Journées de Cherubini.
Pouvez-vous raconter les faits historiques sur lesquels l’histoire se base ?
Durant la révolution, Nantes est restée républicaine alors qu’Angers a basculé du côté des Vendéens. Nantes était donc la ville où l’ont rassemblait les prisonniers politiques et de droit commun. Il y avait notamment des prêtres réfractaires, des religieux et religieuses, des nobles, etc. Les prisons de Nantes étaient engorgées : quand Jean-Baptiste Carrier est arrivé, il a décidé de vider ces prisons en assassinant les détenus. Une milice, composée de petits commerçants, a été employée à cette tâche. Ils ont mis au point un système de barges dont le fond s’ouvrait afin que tout le monde coule et se noie. Dans l’opéra, l’un des personnages est le charpentier qui a imaginé ce système. Il est terrorisé par l’utilisation qui est faite de son invention et est un personnage important de l’intrigue. Mascagni a souhaité atemporaliser cette histoire : il n’est pas explicite dans l’opéra que cela se passe à Nantes.
Pourquoi cette œuvre n’est-elle jamais donnée ?
Mascagni n’a jamais vraiment traversé la frontière : au début de la guerre de 1914, l’Italie est du côté de l’Autriche et de l’Allemagne, ce qui a créé une rupture. Chez Mascagni, tout le monde s’est contenté de Cavalleria Rusticana, dont le couplage avec Paillasse s’est imposé très vite malgré des critiques très vives. Leoncavallo a d’ailleurs connu le même sort. Il faut dire que le succès de Puccini ne leur a pas laissé beaucoup de place. Après la guerre (Il piccolo Marat est créé en 1921), son travail a suscité une indifférence totale. Il a été catalogué comme vériste alors que le vérisme n’est pas une école. Il n’y a pas eu de théorisation du vérisme. C’est une attitude. D’ailleurs, Mascagni a aussi composé des œuvres amusantes, comme L'Ami Fritz.
Quelle sera l’étendue de la mise en espace de Sarah Schinasi ?
Ce sera une légère mise en espace pour animer le concert, mais les chœurs seront immobiles, l’orchestre sera sur le plateau et les chanteurs devant. Il n’y aura pas de décor ni de costume. Sarah Schinasi a fait tout un travail dramaturgique et a traduit le livret (il n’avait jamais été traduit en français).
Qui est Mario Menicagli qui assurera la direction musicale ?
C’est lui qui dirigeait la production de Livourne. Il avait fait un très beau travail sur la partition, pour en réduire un peu l’orchestration. Quand on a vu le magnifique résultat, on a proposé au chef et aux chanteurs de venir le faire en concert chez nous. C’est dans cette production que nous avons découvert Samuele Simoncini, que nous avons également engagé pour la Tosca que nous venons de donner.
Viendra ensuite l’un des plus grands tubes du répertoire : La Traviata mise en scène par Silvia Paoli. À quoi ressemblera son projet ?
C’est un projet très féministe. Elle considère que Violetta est une femme seule, opprimée par la société et en particulier par les hommes. Elle n’a aucune empathie pour les Germont père et fils : elle n’en fera pas des personnages attachants. Ce qui touche Violetta, c’est qu’Alfredo soit fou amoureux d’elle. Elle ne craque pas pour un particulièrement bel homme, mais pour quelqu’un qui l’aime sincèrement : c’est cela qui est beau. Mais il oublie vite son amour et lui fait vivre un moment terrible chez Flora. Quant au père, il a des bouffées de pitié pour elle, mais cela ne l’arrête pas pour autant. Dans la scénographie, il y a des moments de solitude visuelle, qui vont être très beaux.
C’est une coproduction avec Rennes, Tours, Nice et Montpellier : comment s’est-elle mise sur pieds ?
Nous aurons une première exploitation dans nos trois villes de Nantes, Angers et Rennes, puis la production tournera quelques semaines plus tard à Tours, dont le Directeur Laurent Campellone dirigera aussi chez nous. Il y aura ainsi une continuité sur cette première exploitation, avec un chef et une distribution identiques pour les quatre théâtres. Nice et Montpellier la donneront la saison suivante. Nous nous sommes rendu compte qu’il n’y avait pas eu beaucoup de Traviata ces dernières années, donc nous avons proposé à nos collègues de nous rejoindre.
Comment avez-vous construit votre double distribution ?
Laurent Campellone est un grand professionnel qui connait bien nos théâtres et pourra donc s’y adapter au fil de la tournée. Il a une bonne image auprès de nos musiciens de l’ONPL. Cela avait donc du sens de l’inviter.
À 40 ans, la voix tend à évoluer vers des rôles plus lourds comme celui de Tosca : il faut trouver des chanteuses d’environ 30 ans. Ce ne sont pas forcément des artistes déjà très connues. Nous aurons donc Maria Novella Malfatti et Darija Auguštan. Cette dernière est une soprano croate qui est venue auditionner : elle nous a surpris par la qualité de son interprétation. C’est un rôle très difficile car il y a trois Violetta différentes au fil de l’œuvre. C’est un personnage complexe, à la fois fort et faible, qui connait sans arrêt des moments de bascule. Cela exige de l’interprète une grande présence scénique. Alfredo sera interprété en alternance par Giulio Pelligra, qui a chanté Nemorino dans L'Élixir d'amour chez nous, et Francesco Castoro qui sera une découverte pour notre public. Ils correspondront bien à l’image que veut en donner Silvia Paoli : un jeune homme impulsif et machiste, qui peut finalement être assez méchant. Dionysios Sourbis chantera Germont : je l’avais invité pour L’Oresteia de Xenakis quand j’étais à Rennes [lire notre compte-rendu de cette production de 2016]. Il avait été absolument formidable : depuis, je voulais le réinviter. Il a maintenant la maturité nécessaire pour le rôle.
En février et avril, vous présenterez La Falaise des lendemains de Jean-Marie Machado, qui aura été créée à Rennes en novembre. Comment ce projet est-il né ?
C’est moi qui ai rencontré en premier Jean-Marie Machado, un musicien que j’aime beaucoup, qui m’a parlé de son désir d’opéra. J’ai très vite partagé ce projet avec Matthieu Rietzler [le Directeur de l’Opéra de Rennes, ndlr] afin que nous le portions ensemble. Ce sera le premier opéra de Jean-Marie Machado : il n’avait jamais travaillé la forme. Il a travaillé avec son complice de toujours, Jean-Jacques Fdida, qui a fait un livret étonnant, un peu vériste avec des échappées poétiques.
Comment résumeriez-vous l’intrigue ?
L’action se déroule dans un port. C’est la rencontre de plusieurs mondes : il y a des fées, des personnages de bateleurs et des personnages très terrestres. Ça chantera en anglais, en français et en breton. L’histoire est très réaliste par certains côtés et très onirique par d’autres. Je compare beaucoup ce livret au réalisme poétique de Marcel Carné. Jean Lacornerie est chargé de la mise en scène : il intervient dès la conception de l’œuvre pour faire réfléchir le compositeur à ce qu’il a envie de voir. C’est quelque chose qu’il sait très bien faire. Il a échangé des idées de scénographies avec Jean-Marie Machado. Ils ont notamment considéré qu’il était bien que les musiciens soient sur le plateau, participent à l’action et en soient un petit peu spectateurs également.
Quel en sera le style musical ?
Ce sera le jazz de Machado avec une part d’improvisation et des influences latino et bretonnes. Il s’est aussi intéressé à l’écriture contemporaine : cela fait partie des éléments de langage qu’il souhaite intégrer. Il y aura plus d’atonalisme qu’il n’en utilise habituellement. Cela va être très intéressant. La production sera dirigée du piano par Jean-Charles Richard, à la tête de ses musiciens de l’Ensemble Danzas. La distribution est très diverse : nous voulions un travail sur l’idée de rencontre. Rencontres entre le contemporain et le jazz, un certain vérisme vocal et des voix traditionnelles. La distribution reflète ces différents styles et les différents mondes que j’évoquais. C’est le compositeur qui a mené les auditions et a choisi les interprètes, avec en plus un critère de familiarité linguistique.
En avril, vous accueillerez une nouvelle production de la co[opéra]tive : Le Carnaval de Venise de Campra mis en scène par Yvan Clédat et Coco Petitpierre et dirigé par Camille Delaforge : pourquoi vous être associé à ce projet ?
J’ai découvert Campra il y a près de 30 ans et je trouve que c’est un musicien très important : c’est le chainon essentiel entre Lully et Rameau. J’avais très envie de le jouer. C’est un compositeur qui est toujours intéressant, qui intègre la danse de manière naturelle et qui est aussi un homme de théâtre. Il était d’Aix-en-Provence, est allé à Toulouse, puis s’est fait engager à Notre-Dame de Paris mais son rêve était de faire du théâtre. Il a commencé dans les salons du Prince de Conti et a fini par se faire engager par l’Académie royale de musique. Ce que j’aime beaucoup dans Le Carnaval de Venise, c’est le fait qu’il y ait du théâtre dans le théâtre, de l’opéra italien dans de la comédie-ballet française. C’est une œuvre pleine de gaité et de folie. L’idée de la co[opéra]tive de confier ce projet à cet étonnant duo de metteurs en scène est très adaptée. Ils viennent du théâtre visuel et du cirque : ils ont une imagerie colorée, ce qui correspond bien à ce répertoire qui doit être vivant et joyeux, avec des aspects visuels aussi frais que l’est la musique. C’est un projet très bien bâti.
En mai, vous présenterez La Flûte enchantée en coproduction avec Rennes : sera-t-elle retransmise sur grands écrans ?
En effet, en direct du Grand Théâtre d’Angers pour la première fois, puisque nous n’avions pu y donner les représentations et la retransmission de La Chauve-Souris en 2021. La Flûte est un ouvrage auquel on ne peut que revenir régulièrement : on ne peut pas s’en empêcher. C’est un vrai conte, qui n’a pas été donné ici depuis une dizaine d’années. Cela faisait encore plus longtemps qu’il n’avait pas été joué à Rennes : ce choix d’opus tenait à cœur à Matthieu Rietzler. C’est un ouvrage inusable dont il est toujours intéressant de voir de nouvelles visions de mise en scène.
Qu’attendez-vous de la mise en scène de Mathieu Bauer ?
Il a déjà fait le Rake's progress chez nous. C’est une œuvre difficile à mettre en scène car il y a un fort contraste entre les deux parties : tout s’assombrit soudain dans la seconde moitié. C’est la principale difficulté à laquelle Mathieu Bauer a été confronté. Mais il a de très belles idées dramaturgiques pour unifier ces différentes atmosphères. L’intrigue se déroulera ainsi dans une fête foraine : il va beaucoup retravailler les textes parlés. Sarastro sera une sorte de Monsieur Loyal du début à la fin. Cela évite que son apparition ne plombe l’atmosphère. Il apportera aussi de la légèreté à la seconde partie, notamment en transformant l’épreuve en tour de manège. Ce sera une vision très familiale de l’œuvre.
Pourquoi avoir choisi Nicolas Ellis pour diriger l’œuvre ?
C’est le nouveau Directeur musical de l’Orchestre National de Bretagne. Mais il ne l’était pas encore quand nous l’avons choisi. C’est un jeune canadien formidable, très frais dans son style. Nous avons mené beaucoup d’auditions pour constituer la distribution. Elsa Benoit fera sa première Pamina : nous sommes ravis qu’elle la fasse chez nous. C’est une chanteuse qui a un style parfait pour le répertoire du XVIIIe siècle, et qui avait été formidable dans le Rake’s progress.
En Papageno, nous aurons le jeune Damien Pass. Nous avons beaucoup hésité pour Tamino, avec des chanteurs un peu plus mûrs, déjà prêts (et même actifs) pour le bel canto. Nous avons finalement opté pour Maximilian Mayer. Florie Valiquette, qui chantera une Reine de la nuit extravertie, est Québécoise et parfaitement francophone. Enfin, Nathanaël Tavernier chantera un Sarastro très souple et élégant. On l’a déjà engagé plusieurs fois, notamment dans Hamlet et Un Bal masqué. C’est un très bon germanophone.
En juin, vous présenterez une autre création : Messe pour une planète fragile de Guillaume Hazebrouck : comment décririez-vous ce projet mis en espace par Guillaume Gatteau et dirigé par Rémi Durupt ?
C’est un oratorio qui sera présenté avec toutes les strates d’artistes, du professionnel aux amateurs. Nous aurons notamment comme soliste Nayel Hóxò, une chanteuse béninoise qui vit à Nantes. Une personnalité très forte, migrante qui sera en vedette. Le Chœur d’Angers Nantes Opéra sera également mobilisé, avec une importance prépondérante. Il y aura aussi un groupe d’enfants, qui avait participé aux Sauvages, qui aura un rôle semi-professionnel. Enfin, il y a aura des classes d’enfants de quartiers qui auront de petites interventions. Le texte sera un grand plaidoyer pour la planète. Comme pour les Sauvages, c’est l’Ensemble Frasques qui m’a proposé le projet, qui m’a intéressé. Il est enraciné sur la ville de Nantes et ne sera donc présenté que dans cette ville. Ce sera mis en espace par Guillaume Gatteau, avec de la vidéo pour évoquer de manière abstraite cette planète pour laquelle nous sommes tous inquiets.
Le baroque sera représenté en concert par la Cappella Mediterranea, avec Il Nabucco de Falvetti : qu’attendez-vous de ce projet ?
C’est la première fois que je fais revenir à Nantes Leonardo García Alarcón, l’un des musiciens que j’admire le plus. Il a énormément d’imagination. Le travail qu’il a réalisé sur ce Falvetti est exceptionnel. Ce projet mobilise six voix et six instruments. Il a fait une orchestration très méditerranéenne : le percussionniste fera d’ailleurs également un récital Voix du monde à quinze jours d’intervalle. Ce n’est pas un projet nouveau : il a déjà tourné. C’est une explosion de couleurs : ça va être formidable. Ce concert s’inscrit dans la saison Baroque en Scène, qui est partagée avec la Cité des congrès et avec les Concerts de la Cathédrale. Dans cette saison baroque figurera également le spectacle Close Up de Noé Soulier, ainsi qu’une pièce de théâtre de Jeanne Candel, qui s’appelle Baùbo, de l’art de n’être pas mort, qui est absolument formidable. Il y aura des musiques de Buxtehude et Schütz, mais arrangées pour banjo, violoncelle, percussions modernes et une chanteuse. C’est un projet qui extrapole le baroque, sur un sujet autour du deuil et de la renaissance.
Il y aura aussi un concert Destins de Reines avec Patricia Petibon : à quoi ressemblera-t-il ?
Nous essayons de faire travailler les ensembles qui vivent en Pays de la Loire et cela faisait longtemps que je n’avais pas invité Héloïse Gaillard et son Ensemble Amarillis : ils accompagneront donc ce concert. Olivier Py, qui a écrit sur Aliénor d’Aquitaine, présentera aussi ce programme au Théâtre du Châtelet. Il voulait ajouter de la vidéo : nous présenterons donc le spectacle augmenté de ces ajouts.
Quels sont les grands axes de votre programmation pour le Chœur (3 concerts l’an dernier) ?
Le Chœur sera vraiment à l’honneur dans le Piccolo Marat, dont la partition chorale est gigantesque, mais aussi dans Traviata ainsi que dans la Messe pour une planète fragile. Il sera également invité à Massy pour une reprise de notre Hamlet. Ils feront aussi quatre programmes « Ça va mieux en le chantant » sur les cinq de la saison. Ils auront enfin un projet avec le Printemps des Orgues, pour lequel ils chanteront le Te Deum de Bizet : cela changera des Requiem. Je souhaitais une pièce joyeuse.
Êtes-vous toujours satisfait des résultats de votre série de concerts Voix du Monde ?
Les concerts Voix du Monde sont très importants pour moi. J’espère que mon successeur aura envie de poursuivre cette initiative. Cela fait venir dans le théâtre de nouveaux publics, et permet de rencontrer de nouveaux partenaires. Ainsi, cette année, nous travaillerons avec le Festival de cinéma d’Afrique : la veille de l’ouverture du festival, nous accueillerons la chanteuse éthiopienne Selamnesh Zéméné, qui adore travailler avec un groupe breton, le Badume’s Band, qui est devenu spécialiste du répertoire éthiopien. Nous aurons une soirée flamenco avec le Festival de cinéma espagnol. Nous voyagerons aussi en Iran avec la famille Chemirani, qui travaille également avec un breton : le flûtiste Sylvain Barou qui jouera aussi du duduk.
Que proposez-vous pour le jeune public ?
Chaque saison, nous essayons de faire une proposition de spectacle pour enfants. Cette année, ce sera Le Voyage de Wolfgang. C’est une proposition de Marie-Bénédicte Souquet, qui part vraiment de Mozart et de ses voyages avec ses parents et sa sœur, lorsqu’il était enfant. Cela lui donnera l’occasion de chanter des extraits d’opéras. C’est un programme que nous allons faire tourner dans la région.
Quels sont les rêves qu’il vous restera à accomplir pour votre dernière saison, en 2025/2026 ?
Je n’ai pas vraiment de rêve : mon travail est un rêve. On va faire une belle saison pour le public. Les grands titres sont déjà décidés. Mais je ne recherche pas une apothéose, ou un grand projet conclusif. Travailler dans l’opéra est merveilleux en soi. Côtoyer au quotidien tous ces artistes des ateliers qui fabriquent les décors et les costumes : rassembler ces gens-là est un travail formidable. Je suis un directeur d’opéra heureux, même dans les difficultés.