L'Angleterre se reconfine
"Une nouvelle volte-face extraordinaire" c'est ainsi que le sérieux journal The Guardian décrit la décision annoncée par le Premier Ministre Britannique d'un nouveau mois de confinement en Angleterre. Les mesures s'appliqueront à partir de ce jeudi 5 novembre et jusqu'au 2 décembre au moins, et elles touchent une fois encore le spectacle vivant avec la plus grande des rigueurs.
Boris Johnson suit ainsi le mouvement de reconfinement qui se généralise en Europe (en France, Allemagne, Autriche, Belgique, Italie, Suisse) mais il le suit avec un peu moins de retard que lors de la première vague (le pari d'une immunité collective ayant littéralement mené le Premier Ministre en soins intensifs à l'hôpital et le Royaume-Uni à pleurer 46.000 décès dans la population). Le Royaume-Uni semblait toutefois avoir mieux (ou plutôt moins mal) géré le déconfinement et la rentrée qu'en France où les infections ont augmenté de manière vertigineuse, mais la courbe des infections affiche la même pente au Royaume-Uni depuis le début du mois d'octobre.
Chaque pays adapte toutefois sa stratégie de reconfinement, avec une série d'exceptions (la seule exception dans ces mesures d'exception est toujours la culture puisqu'elle ne bénéficie jamais d'aucune exception). Outre-Manche aussi la culture vivante n'est pas considérée comme un "secteur essentiel", a fortiori dans un Royaume où les artistes peinent à survivre et où plusieurs politiciens leur ont expliqué qu'il s'agissait désormais de trouver un autre métier. Preuve de l'urgence de la situation toutefois, les pubs et restaurants seront également fermés en Angleterre, mais les lieux d'éducation (y compris les universités) resteront ouverts. Là aussi, les gens peuvent continuer à aller travailler, sauf dans le monde du spectacle.
L'Angleterre ne subventionnant pas ses théâtres à la même hauteur que la France et les garanties en période de chômage n'étant pas comparables, les institutions culturelles britanniques doivent se résoudre à ne pas jouer (hormis quelques retransmissions en ligne). Pire, le Royal Opera House a dû vendre un joyau de son patrimoine : le portrait de Sir David Webster (Directeur du Royal Opera House de Londres entre 1945 et 1970) peint par David Hockney. Ce tableau est l'une des rarissimes commandes acceptées par ce fameux peintre, qui immortalisera 30 ans plus tard Sir George et Lady Mary Christie de Glyndebourne pour la National Portrait Gallery. Rajoutant la déception au drame, ce tableau dont le Royal Opera House espérait obtenir 18 millions de livres a été adjugé 12,8 millions (un peu plus de 14 millions d'euros) : encore très insuffisant donc pour une maison qui explique avoir perdu 60% de ses revenus depuis le début de la crise (revenus de 127.5 M£ annuel en temps normal) et qui a déjà dû rayer 400 employés de ses effectifs. Le Directeur Alex Beard a rogné sur une grande partie de ses émoluments et le Directeur Musical Sir Antonio Pappano a renoncé à son salaire durant le confinement.