Raffuts sanitaires dans le poulailler du Bal Masqué à Madrid : la représentation annulée
L'Opéra est un lieu historique de scandales (des batailles esthétiques ayant dégénéré en pugilats et encore de nos jours en noms d'oiseaux). Le Théâtre Lyrique a même été le siège de révoltes et de révolutions (depuis les manifestations anti-autrichiennes dans l'Italie occupée jusqu'à la Révolution belge déclenchée par l'Opéra). La pandémie de Coronavirus imprévisible apporte désormais des tensions inédites. Les spectacles déconfinés que nous avons régulièrement couverts depuis juin dernier ont démontré combien les consignes sont respectées, bien davantage qu'ailleurs en tous cas.
Toutes les salles de spectacles deviennent ainsi des théâtres distanciés et masqués, mais ironie du sort c'est justement avec Un Bal masqué de Verdi que la saison lyrique reprend à Madrid, et qu'elle a vécu sa première annulation pour cause de conflit en salle. Madrid avait pourtant démontré son respect de toutes les normes, programmant une Traviata distanciée modèle (notre reportage) : indispensable dans ce pays et cette ville particulièrement touchée et attentive. Les deux premières représentation du Bal masqué les 16 et 18 septembre derniers se sont déroulées sans incident mais pour la représentation du dimanche 20 septembre un esclandre est parti des hauteurs du théâtre, certains spectateurs estimant que les distanciations n'étaient pas respectées, et le dénonçant ouvertement (d'autant plus que la distanciation semblait bien respectée au parterre).
La représentation retardée a finalement commencé, s'est interrompue puis a recommencé à nouveau mais les protestations se poursuivant (au rythme de la musique !), le Théâtre Royal de Madrid a finalement baissé le rideau et annulé le spectacle à 21h10 (la représentation aurait dû commencer à 20h).
20.08 hrs. Teatro Real de Madrid. Se retrasa el comienzo de Un baile de máscaras por quejas de los asistentes ante la falta de distancia de seguridad en la zona alta del teatro. Y abajo, se respetan las medidas. pic.twitter.com/RwozGKNkvX
— Emilia Chacón (@EmiliaChacon) 20 septembre 2020
20.50 hrs. El Teatro Real da la opción de devolución y anuncia el comienzo de la obra en 5 minutos. pic.twitter.com/FI2TULSQkl
— Emilia Chacón (@EmiliaChacon) 20 septembre 2020
Comienza Un baile de máscaras en el Teatro Real. pic.twitter.com/1eWWnXWQJk
— Emilia Chacón (@EmiliaChacon) 20 septembre 2020
21.10 hrs Baja el telón en el Teatro Real pic.twitter.com/GI6cumfOJL
— Emilia Chacón (@EmiliaChacon) 20 septembre 2020
El Teatro Real informa que el aforo es menos del 50%. Indignación entre los asistentes. pic.twitter.com/UhuKL3VcVD
— Emilia Chacón (@EmiliaChacon) 20 septembre 2020
Desastre total. Comienzan las aglomeraciones para reclamar en el Teatro Real ️ pic.twitter.com/GDI8mpIJBz
— Emilia Chacón (@EmiliaChacon) 20 septembre 2020
Par un communiqué déjà publié, l'institution lyrique madrilène affirme avoir "respecté toutes les réglementations en vigueur" arguant d'un taux de remplissage à 51,5 % (905 places occupées pour une jauge de 1746), sans préciser toutefois les mesures de distanciations et les jauges spécifiques au "paradis" pour cette date. Le Teatro Real explique avoir immédiatement proposé aux spectateurs récalcitrant un replacement ou un remboursement, ce qui aurait été accepté par une bonne partie de la minorité de spectateurs mécontents, mais pas pour "un très petit groupe insistant pour le boycott."
La Direction du Teatro Real annonce ouvrir une enquête afin d'"élucider les circonstances de ce regrettable incident" et prendra "toutes les mesures nécessaires pour que les représentations suivantes se déroulent normalement".
[Mise à jour : dans un second communiqué publié dès le lendemain des incidents, le Teatro Real explique que la réglementation de Madrid impose le port du masque et une limitation des jauges à 75% (donc pas la distanciation en salles)]
Là encore, ce triste épisode est paradoxalement rassurant sur le fait que le public se saisisse pleinement de l'impérieux respect des consignes sanitaires (comme nous l'avons personnellement fait également) et sur le fait que les institutions continuent de traiter la question avec le plus grand sérieux.