Le 20 juillet, Jeffrey Manachorian, Président de la Fondation Richard Tucker connue pour récompenser et soutenir les débuts de chanteurs et chanteuses lyriques américains, annonçait une décision catégorique : “La Richard Tucker Music Foundation condamne les propos blessants et offensants de l’un des membres de notre organisation, David Tucker. David a été exclu du Conseil d’administration de la Richard Tucker Music Foundation, décision avec prise d’effet immédiate. Les opinions de David ne coïncident pas avec les croyances et mission de la Foundation Richard Tucker, Fondation bâtie sur l’héritage d’un chanteur juif-américain qui souhaitait surmonter les différences religieuses et culturelles”.

A l’heure où le mouvement Black Lives Matter lutte contre le racisme systémique, la soprano Julia Bullock s’est exprimée sur Facebook pour dénoncer les violences policières à l’encontre des manifestants à Portland, détenus de manière arbitraire par des agents fédéraux dans des fourgons banalisés. En réponse à sa publication, David Tucker a commenté : “Bien. Débarassez-vous de ces racailles, je me fiche de savoir où vous les envoyez. Ils sont la vérole de notre société.”  Dans le flot de commentaires qui s’en est suivi, il a exprimé tout son soutien à Donald Trump et aux troupes fédérales dans la répression des mouvements de foule. 

Ses opinons n’ont pas manqué de générer l’indignation chez plusieurs figures du monde lyrique, à commencer par le ténor noir Russell Thomas. Ce dernier lui a notamment rappelé le manque de diversité raciale de la fondation qu’il représente, en mentionnant l’exemple de Lawrence Brownlee, seul interprète noir primé depuis 1978. Ce à quoi David Tucker a répondu : “Sortir la carte raciale est encore une autre excuse arrangeante pour modifier les standards d’excellence des talents vocaux”.  En réaction à ses propos, la Black Opera Alliance, association récemment formée pour lutter contre les situations d’inéquité au sein du monde lyrique s’est exprimée dans une lettre ouverte destinée à la Fondation. Dénonçant le suprémacisme blanc sous-jacent aux propos de David Tucker, ses membres appelaient à la destitution de ce dernier, au motif qu’il “est impossible pour quelqu’un supportant de telles opinions de contribuer de manière productive dans quelconque organisation dont le but est de cultiver respect, équité et justice.”  

Cette démarche a été publiquement soutenue par d’éminents lauréats du prix Richard Tucker, à commencer par Lawrence Brownlee, suivi du baryton Ryan McKinny et la soprano Lisette Oropesa. La superstar Joyce DiDonato, elle-même membre du comité de la Fondation, a déclaré refuser d’y poursuivre ses missions si David Tucker n’en était pas immédiatement exclu et ses commentaires condamnés, ce que la Fondation a fini par faire, ajoutant que des mesures seraient prises pour une meilleure prise en compte de la diversité au sein des auditions et concours à venir par la création d’un comité spécialisé.