Bien belle agitation aux Concerts d’Automne
Ce concert s’inscrit dans l’engouement continu du public pour les contre-ténors, engouement récurrent depuis le revival des musiques « anciennes » des années 1970, comme un écho à une durable fascination pour les castrats chanteurs de l’époque baroque. Un autre engouement, découlant du précédent, concerne le répertoire des opéras seria du XVIIIe siècle italien, dont les arie da capo (airs repris et ornés) permettent l’exhibition de la plus grande virtuosité. Les airs « de tempête », (comme Agitata da due venti - Secouée par deux vents, tiré de la Griselda d’Antonio Vivaldi) sont dans ce cadre une évocation du trouble intérieur du héros ou de l’héroïne, métaphorisé par la représentation d’une tempête, souvent marine, “cliché” poétique remontant à La Jérusalem délivrée du Tasse.
Par deux fois d’ailleurs, le jeune chanteur Samuel Mariño prend la parole pour évoquer son parcours complexe d’une part, et la difficulté extrême d’un air écrit pour le castrat Farinelli. Sa voix parlée est au niveau de hauteur de sa voix chantée, et plus que « contre-ténor », il convient d’utiliser « sopraniste » à son sujet (homme chantant soprano).
Samuel Mariño, dont le succès se confirme, déploie cette voix au timbre naturellement chaleureux, de bonne projection, avec une prononciation soignée. Le registre est assez étendu, avec une petite faiblesse dans le grave car il n’use pas du registre de poitrine. Il alterne les airs de bravoure et ceux plus intimistes, de passions tristes pour conclure avec une fougue et une maîtrise tranquille de la pyrotechnie vocale. Petite curiosité, dans un petit air de Vivaldi (Quell’augellin che canta - Ce petit oiseau qui chante, tiré de La Silvia), il se livre en duo et en écho avec le violon à un jeu de complicité sonore, comme il était fréquent au XVIIIe siècle (avec les trompettes souvent).
Marcello di Lisa sait dynamiser le Concerto de’ Cavalieri, ensemble italien de cordes, comprenant le quatuor, plus une contrebasse et un clavecin. Les effets sonores, de masse, de dynamique et de caractère, sont présents tant dans l’accompagnement attentif des pièces chantées que dans des pièces instrumentales. Le violon ensorcelé d’Enrico Casazza éblouit la salle par une sonorité chaude, riche et une virtuosité se donnant comme évidente, avec, malgré les figures et l’extrême vélocité, une présence sonore dense et constante, du grave au suraigu.
Sous le charme du jeune chanteur, talentueux et plus que prometteur, le public acclame les artistes.