Festival de Sanxay : La Bohème en reliefs gallo-romains
Pour cette édition 2024, les Soirées lyriques de Sanxay proposent une production de La Bohème dont Andrea Tocchio signe mise en scène, décors et lumière. Une vision très traditionnelle, en ce qu'elle respecte l'époque et le contexte de l'œuvre d'origine, et ce dans la tradition de tableaux, peints et vivants. Un cachet auxquels contribuent les costumes de Jérôme Bourdin, mettant en valeur les artistes de cette production, immergée et immergeant pleinement dans ce conte humain, pittoresque et poignant. Toutefois, les mouvements du plateau tournant peuvent être par trop anticipés, dérangeant la beauté et l'intimité installées, et engendrant des temps d'attente entre les scènes.
Dans le rôle de l'écrivain Rodolfo, le ténor Stefan Pop emploie nuances et timbres séducteurs (à destination de ses partenaires de scène comme du public). Même dans les parties les plus aigües et exposées, dont les ténors se servent souvent pour prouver leur vaillance et puissance, Stefan Pop reste serein et calme (ces cimes ne lui posant aucune difficulté), au service d'un poète empli de tendresse et de joie. Son interprétation de l'air "Che gelida manina" se fait d'autant plus touchante et intime.
Adriana Gonzalez offre à la protagoniste Mimi une interprétation faite de nuances, traduisant la passion avec une apparente simplicité confinant à l'évidence. Sa voix équilibrée, à l'image du métier de son personnage, est finement tissée, comme de la soie, mais solide. Ses résonances équilibrent les aigus avec des piani flottants, doux et scintillants.
Charlotte Bonnet fait une entrée remarquée en Musetta, d'une voix sonore aux aigus rayonnants (tout en sachant mettre en valeur sa belle silhouette et ses jeux de jambes pour se faire d'autant plus séductrice).
Le rôle du peintre Marcello est interprété par le jeune baryton Mikhail Timoshenko, déployant la libre résonance de son chant, sa présence vocale généreuse avec des aigus rayonnants et riches d'expression dramatique. Le phrasé se déploie sans le moindre effort physique, couronnant ses débuts plus que prometteurs à Sanxay.
Le baryton de 24 ans Alin Munteanu prête au personnage de Schaunard sa voix claire, jeune, pleine de résonance et de vitalité (lui aussi pour ses débuts in loco).
Adrien Mathonat incarne le rôle du philosophe, Colline avec beaucoup de charme et d'émotions. Sa voix de basse est toujours sonore et bien présente, même si le timbre est un peu sombre. Il sait toutefois monter vers des aigus bien phrasés et caressés.
Olivier Grand assume les deux rôles très différents de Benoît et Alcindoro, non seulement de manière théâtrale mais aussi avec une voix bien présente de baryton. Le ténor Alfred Bironien donne une solide et intéressante interprétation de Parpignol avec sa voix naturelle et son charme scénique. Le ténor Nicolò La Farciola en vendeur, Jean-François Baron en douanier et Thomas Epstein en sergent, assurent complètement leurs rôles de complément.
Le chœur montre solidité et rigueur. Une performance collective à laquelle s'ajoute l'intervention des enfants, également maîtrisée et équilibrée, valorisant le travail effectué avec le chef de chœur Stefano Visconti et le chef de chant Félix Ramos.
Dès les premières phrases musicales, le chef Moritz Gnann conduit l'Orchestre des Soirées lyriques de Sanxay dans des couleurs équilibrées et homogènes. Il soutient les chanteurs sans jamais les couvrir, sachant équilibrer ses élans avec goût, le tout sans décalage aucun et ce toute la soirée durant, même dans les scènes les plus délicates à coordonner.
Le public Poitevin nombreux exprime son contentement envers cette belle soirée lyrique, dans des applaudissements nourris.