Soirée lyrique père & fille au Paris Sainte-Chapelle Opéra Festival
La soirée qui annonçait ainsi de "grands duos père-fille" à l'opéra en proposera finalement seulement trois, mais qui parcourent certes différents registres et relations : Marie "La Fille du Régiment" dont le sergent Sulpice devient ainsi son père adoptif permet d'explorer le registre d'opéra-comique, Pandolfe qui voit sa fille Cendrillon partir vers un Prince charmant, ce qu'il finit par accepter pour son bien à elle, à l'inverse de la situation de Rigoletto sachant sa fille Gilda menacée par son séducteur. Le reste du programme s'émancipe complètement du thème annoncé, pour laisser les solistes chanter des solos qu'ils ont bien en voix (même s'il s'agit d'incarner des personnages dont les rapports au père ou à la fille sont anecdotiques voire inexistants dans leurs livrets respectifs).
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Charlotte Bonnet chante ainsi entre autres l'air de Micaëla car elle vient de l'incarner à Bâle. En soliste comme en duos, la soprano se distingue non seulement par sa maîtrise vocale, mais aussi par son interaction dynamique avec son partenaire et le public (son regard et son expression scénique rendent toutes les émotions variées du répertoire choisi, intense ou joueur, et les deux à la fois). Sa voix est riche et pleine, sachant toutefois garder l'étoffe de son timbre, tout en gagnant en intensité et volume jusqu'aux aigus puissants.
Jean-Michel Balester propose un style vocal et théâtral particulièrement expressif. Sa technique de chant nasale ajoute une nuance, de tendresse et de douceur, à ses personnages même dans les moments intenses (mais cela réduit la puissance vocale et l'impact nécessaires aux duos). La complicité scénique avec Charlotte Bonnet n'en est pas moins évidente (au point que Fabienne Conrad précise en préambule du concert que ces deux artistes ne sont pas vraiment père et fille à la ville).
La pianiste Dorothée Bocquet se distingue par un jeu spectaculaire, au toucher tentaculaire : lui permettant ainsi de traduire la richesse d'un orchestre dans son instrument, mais transformant les pièces solistes de Fauré qu'elle a choisies (en raison de l'année Fauré et sans lien aucun là encore au programme), en des démonstrations de virtuosité loin de l'esprit et de la lettre de ces œuvres et de cet artiste.
L'enthousiasme du public à la fin du concert est tel qu'il se prolonge en une standing ovation. Cependant, malgré le désir manifeste de l'assistance, aucun bis n'est possible ce soir : la Sainte-Chapelle sise dans l'enceinte du Palais de Justice de Paris doit fermer sans délais, et le public quitte les lieux sur cette soirée vibrante en admirant comme toujours ce monument.