Domenico Scarlatti à Perpignan, un point culminant pour Le Caravansérail
Le Festival de Musique Sacrée de Perpignan propose une riche programmation, avec plus d’une soixantaine de compositeurs de toutes époques interprétés par des artistes de renom et émergents. Parmi les concerts phares nommés "Concerts Florilège", cette soirée rend hommage à Domenico Scarlatti avec sa vision du "Stabat Mater". Cette œuvre, toujours mystérieuse (y compris) quant à sa date de composition, résonne à travers les siècles et, en outre en cette occasion, le concert intervient au lendemain de la Journée européenne de la musique ancienne.
Pour servir au mieux cette œuvre, le Festival accueille pour la première fois l’Ensemble Le Caravansérail dirigé par le claveciniste Bertrand Cuiller, des connaisseurs de cette pièce. En effet, ce concert marque la fin d’un chapitre pour l'ensemble, après trois ans de tournée et un enregistrement au disque en 2022.
Le chœur introduit le programme avec la Messe de Madrid où les voix viennent chatouiller l’acoustique de l'église. Ils revigorent la suite à travers le « Te Deum pour double chœur » où un charmant dialogue se crée mêlant entrain et douceur, veillant à contraster les différents passages avec des legati et des nuances prononcées.
L'exécution de la pièce maîtresse démontre une virtuosité égale. Les dix voix, toutes indépendantes, se révèlent dès le premier couplet avec un son pur et généreux, amplifié par l'imposante voûte de l'Église des Dominicains. À l'écoute les uns des autres, le groupe atteint une précision musicale sans faille. Cependant, certains passages, comme le « Sancta Mater istud agas » mériteraient un tempo plus lent afin de savourer pleinement l'entrée de chaque voix, et le texte.
Les sopranos Cécile Achille, Hasnaa Bennani, Marie Planinsek et Anaïs Bertrand allient des timbres remarquablement justes et aériens : d’abord séparées, elles se rejoignent pour former un quatuor imperturbable, accompagné, parfois de façon plus timide, par les altos Léo Fernique et Leandro Marziotte, qui démontrent leur potentiel à travers de jolies phrases et un timbre soyeux (mais qui manquent un peu d'ancrage dans les moments fortissimo). Les ténors Olivier Coiffet et Antonin Rondepierre apportent des harmoniques médiums langoureux et suaves, ainsi qu'un chant élancé et sincère. Le premier se détache par la clarté assurée de ses interventions, à la brillance vibrante. Enfin, les basses Étienne Bazola et Nicolas Certenais servent de piliers, soutenant leurs camarades par leurs timbres profonds et ronds.
Quant aux instruments, l’ensemble est constamment, intensément et clairement guidé par le claveciniste Bertrand Cuiller, qui assure uniquement la direction ce soir, indiquant les intentions tout en laissant une certaine autonomie aux interprètes. L'accompagnent des voix reste fluide, apportant davantage de corps et de profondeur au chant en accentuant les basses. En guise d’intermède, Jean-Luc Ho montre son habilité dans les variations de tempo avec une sonate pour clavier.
La soirée se conclut ainsi sous les applaudissements chaleureux d'une nombreuse assistance de fidèles.