Noël à Versailles avec Sonya Yoncheva
Il y a un an, ces mêmes artistes se produisaient avec un vif succès pour une soirée musicale consacrée à des airs de Haendel, dans la Galerie des Glaces du Château de Versailles. Le programme élaboré pour le présent concert au sein de la Chapelle Royale (qui affiche naturellement complet), se partage entre des pages sacrées et des mélodies célèbres dédiées au temps de Noël. Que ce soit dans un air extrait du Messie de Haendel ou de la Messe solennelle de Sainte Cécile de Gounod, la voix d’or de Sonya Yoncheva emporte visiblement l’auditeur par sa simple magnificence, ce velours soyeux qui recouvre l’ensemble de la tessiture et cette imposante ampleur capiteuse qui vient emplir l’espace acoustique du vaisseau de la Chapelle Royale. La nativité marque la suite du programme avec notamment le célébrissime White Christmas d’Irving Berlin, le Minuit Chrétien par Adolphe Adam, Arru, Arrurrú(chant de nativité du Honduras), ou venant en conclusion l’ineffable Stille Nacht, heilige Nacht (Douce nuit, sainte nuit) où la voix de Sonya Yoncheva se mêle avec délectation aux voix du Chœur.
Le chant de la cantatrice, qui semble elle-même à plusieurs reprises comme éblouie par les lieux, semble répondre aux ors de la Chapelle. À chaque instant du concert et pour chaque morceau, Sonya Yoncheva baigne sa ligne vocale d’une grande part d’expressivité, n’hésitant pas à plonger dans un registre grave bien établi et s’appuyant sur un aigu glorieux, un peu sec toutefois à plusieurs reprises. Le soutien permanent et la gestion du souffle imprègnent son interprétation de Sogno d’Or, mélodie de Giacomo Puccini ou de l’Ave Maria tiré de l’opéra Cavalleria Rusticana de Pietro Mascagni, qui vient clore la première partie du concert.
Après l’entracte, le Pie Jesu du Requiem d’Andrew Lloyd Webber devait réunir les voix de soprano de la cantatrice et de son fils Mateo Garcia Hindoyan, âgé de neuf ans, mais qui a dû renoncer en dernière minute, laissant sa partie à une jeune artiste du Chœur, au timbre clair et délicat, vivement saluée pour sa prestation par Sonya Yoncheva. [mise à jour : la chanteuse en question n'est autre qu'Isaure Brunner, pour la plus grande et légitime fierté de son père]
Une grande complicité artistique semble s’être durablement établie entre la chanteuse et le chef d’orchestre polonais par ailleurs éminent violoniste, Stefan Plewniak. Sa silhouette mince habillée d’une longue tunique noire et ses gestes nerveux rehaussés par une chevelure abondante peuvent au premier abord surprendre. Mais toute sa direction est empreinte d’une vive sensibilité, à la fois virtuose et pleine. Elle rend pleinement justice à toutes les pages musicales très diverses proposées. Et l’Orchestre de l’Opéra Royal de Versailles, modèle tout au long de la soirée, de répondre avec enthousiasme aux sollicitations de son chef qui interprète en sus en sa compagnie le Canon de Pachelbel et le Concerto pour la Nuit de Noël d’Arcangelo Corelli. Le Chœur de l'Opéra Royal de Versailles (fondé l'année dernière) montre également toute sa plénitude et sa cohérence dans l’articulation des timbres et des tessitures.
Devant les hourras d’un public totalement électrisé, Sonya Yoncheva et ses partenaires offrent plusieurs bis, dont "Tristes Apprêts" de Castor et Pollux de Rameau et même Petit Papa Noël appris le matin même par la cantatrice au sourire éclatant !
Le public ravi se donne déjà rendez-vous pour la suite de ce cycle de Noël à la Chapelle Royale avec les temps forts et traditionnels que sont l’Oratorio de Noël de Bach (le 22 décembre par La Chapelle Harmonique de Valentin Tournet) et Le Messie de Haendel (les 23 et 24 avec de nouveau le Chœur et l’Orchestre de l’Opéra Royal de Versailles, placés sous la direction de Gaétan Jarry).