Cosi fan tutte divertit le public Soustonnais au Festival Opéra des Landes
Après 21 ans de bons et loyaux services, Olivier Tousis a passé la main de la direction artistique de son Festival Opéra des Landes à Yassine Benameur, qui pour sa première édition, a choisi de collaborer avec les Opéras de Clermont Auvergne et de Massy, pour offrir à son public fidèle la production du célèbre Cosi fan tutte de Wolfgang Amadeus Mozart par Opéra Eclaté.
À cette occasion, Eric Perez signe une mise en scène dynamique mais sans surprises. Inspiré par le film Cris et chuchotements d’Ingmar Bergman, le metteur en scène a imaginé une grande boîte monochrome rouge (couleur de la passion) dans laquelle les chanteurs évoluent, dans de magnifiques costumes créés par Stella Croce, monochromes eux aussi mais blanc cassé (la fausse pureté, peut-être). Cette boîte sert à observer les personnages comme s’il s’agissait d’une expérience de laboratoire. Une passerelle permet même d’observer leurs faits et gestes depuis le dessus de la boîte. Autour de celle-ci, des mannequins portant différents costumes (utilisés plus tard par Despina), placent la pièce sous le signe du déguisement. A part cela, toutes les images d'Épinal y sont (même en ces Landes) : bataille de coussins entre les deux sœurs, corsets sexy, sexualisation des situations.
L’ensemble instrumental est simplement composé d’un quintette à cordes et d’un quintette à vents, dirigés par Gaspard Brécourt avec beaucoup de sensibilité, de délicatesse et surtout d’écoute pour les chanteurs. En effet, les instrumentistes étant placés à jardin il semble que les chanteurs, gênés par la paroi du décor (de Patrice Gouron), souffrent de mal les entendre et les problèmes de mise en place inévitables se multiplient, malgré tous les efforts visibles du chef.
Tous les récitatifs secs ont été remplacés par des dialogues en français, ce qui allège passablement l’œuvre et dynamise la comédie. Jean-Gabriel Saint-Martin est un Don Alfonso, qui chante comme il parle : avec beaucoup de générosité, d’une voix chaleureuse et brillante. Comique sans trop en faire, il apporte beaucoup d’équilibre aux scènes, notamment dans les ensembles vocaux, et impressionne par son aisance, scénique comme vocale.
Le duo Ferrando/Guglielmo, porté respectivement par Pierre-Emmanuel Roubet et Mikhael Piccone, est très équilibré qui charme autant les oreilles que les zygomatiques, les deux chanteurs exploitant leur potentiel comique avec beaucoup de talent. C’est dans le deuxième acte que tous les chanteurs se révèlent le plus : Pierre-Emmanuel Roubet est beaucoup plus dans le corps, moins fragile vocalement et peut se permettre une grande sensibilité musicale. La voix est toujours assez en arrière, mais le ténor montre de meilleures qualités techniques et scéniques qu’il y a trois ans dans L’Elisir d’Amore dans le même cadre. Mikhael Piccone dévoile une voix agréable et ronde, parfois inégale, notamment lors de passages trop laryngés.
Le duo féminin quant à lui est moins équilibré, Charlotte Despaux (Fiordiligi) chantant comme elle parle et joue : souvent trop fort et sur un même plan. Si son jeu est parfois trop forcé, elle aussi se révèle beaucoup plus dans le deuxième acte, son second air lui offrant le parfait écrin pour montrer l’étendue de sa palette musicale et vocale. Très émouvante, elle prouve qu’elle sait proposer de superbes nuances et une grande musicalité. Sa voix, tendre et sonore à la fois, se déploie avec beaucoup de souplesse dans de grandes lignes au souffle sans fin. Pour lui donner la réplique, Eléonore Pancrazi (Dorabella) n’est pas en reste : son jeu d’actrice est irréprochable, aussi sensible que comique, et la voix superbe, timbrée, homogène. Analia Telega en Despina montre plus de qualités scéniques que vocales. En effet, la voix manque beaucoup de projection et de brillance, mais la chanteuse se rattrape en apportant beaucoup d’humour à la pièce.
Pour finir, le chœur amateur Opéra des Landes, toujours aussi volontaire, intervient avec beaucoup d’enthousiasme et d’engagement et permet au festival de conserver son esprit familial et local qui plaît tant au public, visiblement conquis par cette production.