Stéphane Degout et La belle Maguelonne au Théâtre de l’Athénée
Encore auréolé de sa prise du rôle-titre d’Eugène Onéguine de Tchaïkovski au Théâtre de la Monnaie de Bruxelles, Stéphane Degout revient au Lied avec le cycle La belle Maguelonne du jeune Johannes Brahms. Déjà présenté en divers lieux, dont l’an dernier au Festival Radio France de Montpellier, ce concert propose un voyage romanesque reliant musique et texte. Installés dans une sorte de petit salon, les deux chanteurs -Stéphane Degout et Marielou Jacquard-, sont accompagnés par la lecture d’un texte inspiré des poèmes des lieder dus à Ludwig Tieck et du manuscrit languedocien d’origine de l’histoire daté de 1453. Le comédien Roger Germser intervient ainsi entre chaque Lied afin d’expliciter avec goût et sensibilité les aventures mouvementées et les amours de Maguelone, princesse napolitaine et de Pierre, fils du Comte de Provence jusqu’à leurs retrouvailles dans le pays natal de Pierre.
Stéphane Degout, initiateur du projet, a confié l’interprétation de plusieurs Lieder à la mezzo-soprano Marielou Jacquard, ceux dédiés à Maguelone elle-même ou à Suleima, fille du Sultan de Constantinople qui s’est éprise de Pierre. Ainsi les deux chanteurs se partagent-ils le cycle. Marielou Jacquard se distingue par sa vibrante musicalité et déploie une voix basée sur une émission franche et assez naturelle, même si quelques sons peuvent paraitre un peu durs. L’émotion perce en continu dans son interprétation.
Pour sa part, Stéphane Degout livre un chant particulièrement sonore, chaleureux et viril. Le grave semble encore avoir gagné en amplitude tandis que l’aigu surprend encore par sa vivacité. L’auditeur tremble lors de son voyage dans une mer déchainée, ou se laisse porter par ses déclarations d’amour enflammées à la belle Maguelone. L’artiste se présente ici dans toute sa flamboyance et sa maturité artistique. Le rapport au texte de Ludwig Tieck est pleinement abouti.
Au piano, Alain Planès se saisit de toutes les atmosphères dépeintes dans le cycle et propose un accompagnement alliant le raffinement et les emportements. Son écoute attentive des deux chanteurs ne se relâche à aucun moment. Pour conclure ce réel moment d’émotion et de plénitude artistique, les interprètes offrent au public présent un autre Lied pour deux voix, La Nonne et le Chevalier sur un texte du poète et romancier allemand Joseph Von Eichendorff et issu de l’opus 28 du compositeur.
Les auditeurs, fin connaisseurs du Théâtre de l’Athénée ne manquent pas de saluer les interprètes pour ce moment d’intelligence et de plaisirs.