Oratorio de Noël, Radio France à l’Opéra de Massy
Alors qu’il est le cantor de l’église Saint-Thomas de Leipzig depuis un peu plus de dix ans, Jean-Sébastien Bach imagine en 1734 un oratorio de six cantates pour accompagner les fêtes de Noël jusqu’à l’Epiphanie : un Oratorio de Noël, dont l'ensemble est désormais souvent interprété par moitié afin de réjouir une seule et même soirée de fin d'année. Les phalanges de Radio France, dans le cadre de leurs tournées font ainsi étape à l’Opéra de Massy pour partager les trois premières cantates de cette œuvre : La Nativité, L’Annonce faite aux bergers et L’Adoration des bergers.
Sous la direction précise, souvent droite et toujours attentive de Václav Luks, dont les poignets agiles se font tantôt impulsions vives tantôt souples caresses, l’Orchestre National de France se montre incisif en préservant ses effets de transparence. La finesse de la direction d’ensemble est ainsi patente et se transmet aux chanteurs comme aux instrumentistes. Les différentes parties sont équilibrées et les intentions le plus souvent très homogènes au sein d’un même pupitre et même entre eux (quoiqu’un violoniste, tel la “brebis égarée” du troupeau crée de rares aspérités avec des placements d’archet différents). Les timbales et trompettes éclatantes qui introduisent le premier chœur impulsent une évidente réjouissance dont les artistes du chœur s’emparent avec aisance. Préparés avec grand soin par Edward Caswell, ceux-ci font entendre une diction particulièrement attentive et une palette de nuances très à propos. L’expressivité retenue, presque sobre et pourtant si sensée des chorals se révèle par elle-même au travers de cette apparente simplicité. Les longues vocalises sont ciselées avec minutie, particulièrement chez les voix féminines et notamment lors des passages au contrepoint le plus dense.
Les quatre chanteurs solistes du soir confirment leur expertise dans ce répertoire, à commencer par le ténor Julian Prégardien qui incarne l’Evangéliste avec naturel. Gardant sa partition toujours fermée dans ses mains lors de ses interventions, il partage avec évidence un texte limpide d’une voix aussi projetée qu’équilibrée. Le timbre est clair, épanoui avec délicatesse dans les graves, très légèrement nasalisé dans les aigus. La précision de ses vocalises finit de convaincre l’auditoire d’autant que sa concentration patente affirme aussi sa grande confiance.
La mezzo-alto Lucile Richardot captive elle aussi visiblement l’assistance par la tendresse de son duo avec la violoniste solo Sarah Nemtanu. Ses intentions sensibles, quoique parfois presque trop subtiles pour être bien entendues de toute la salle, sont conduites avec un soutien long et fin. La voix se fait agréablement charnue dans les médiums graves et raffinée dans les registres plus aigus.
La soprano Katharina Ruckgaber déploie une voix aérienne et souple, quoiqu’un peu limitée dans sa projection dans le registre grave, le vibrato très serré mais fluide aidant davantage les aigus à s’épanouir avec aisance. Enfin, le baryton Tobias Berndt affirme son texte soigneusement articulé, avec un timbre clair et bien assis surtout dans les graves, le tout agrémenté d’un soupçon de moelleux. Sa conduite des phrasés est naturelle, sans aucune exubérance inutile.
Le public massicois applaudit avec joie et longuement les artistes de cette soirée, qui annonce les heureux temps de festivités approchant en cette fin d’année.