Mozart en formes et figures au Théâtre des Champs-Élysées
Les spectateurs sont venus nombreux pour cette soirée consacrée à Mozart, laquelle débute par sa Symphonie n°39, avant d’enchaîner sur le Requiem après l’entracte – le clou du spectacle, qui s’achèvera sous les applaudissements enthousiastes du public, dans une salle presque comble.
REPETITION | Rencontre avant l'heure entre nos Musetta et Marcello dans #LaBohème en juin, @Amina_Edris et @duhamelbaritone ❤️ Ici en compagnie d'Eléonore Pancrazi, Amitai Pati, l'@orchambreparis et le chœur du @leconcertspi dirigés par @HerveNiquet pour le #Requiem de Mozart ! pic.twitter.com/RVxnCM9mSZ
— Théâtre des Champs-Elysées (@TCEOPERA) 2 décembre 2022
Pour la symphonie comme pour le Requiem, l’Orchestre de chambre de Paris se fond d’entrée dans la musique et frappe par l’aisance avec laquelle il s’approprie chacune des notes pour les rendre avec vibrance et lumière, en particulier pour l’Allegro de la symphonie qui pétille, ici et là, de quelques couleurs radieuses – le tout sous une direction particulièrement exigeante, l’invitant à faire montre d’un immense travail de netteté, de souplesse et de discipline d’ensemble.
Il en va de même pour le Chœur du Concert Spirituel, qui démontre lui aussi force précision dans le rythme et poursuit avec brio la cadence, notamment dans l’impeccable galop du Dies iræ. La rigueur est de mise – parfois même vers une forme de raideur – et permet à l’ensemble des chanteurs de s’engager vaillamment, coûte que coûte, dans chaque mot, chaque ligne et chaque note. Les contrastes entre les graves et les aigus ne manquent pas d’éclat, eux non plus, et sont même saillants, vivants et tendus, touchant un public qui réservera au chœur une bonne partie de ses applaudissements.
Amina Edris inaugure les passages des solistes par un soprano souple et rebondi, un chant fluide et mené, là aussi, avec précision, pour un timbre plutôt nuancé, voire assez terrestre par moments. Son chant se marie d’ailleurs particulièrement avec le ténor d’Amitai Pati, dont les clartés du timbre se diffusent avec une belle harmonie dans celles de la soprano, créant l’union dans la similitude plus que dans le contraste. Amitai Pati déploie sinon un chant doté d’une ligne lyrique, droite et régulière, le ténor veillant avec application et sérieux à son rendu.
À ses côtés, Alexandre Duhamel propose un baryton plus profond et caverneux, sec et nerveux par endroits, austère, mais profond et contrastant fortement avec la voix du ténor. Enfin, Éléonore Pancrazi soutient un mezzo nuancé, aux graves cuivrés, à la ligne souple et vigoureuse, offrant par là un chant net, soigneux et régulier.
Hervé Niquet dirige l’ensemble des artistes d’une main de maître et d’une poigne de fer. Ainsi relève-t-il chaque nuance, chaque détail de la partition, marquant à la fois l’allure, le dynamisme et la vitesse. Il met en valeur chaque ligne de construction de l’œuvre, comme une vaste forme géométrique, ou une immense structure dont il dévoile l’architecture ou la composition mathématique – et rien n’est laissé au hasard, au détriment d’un certain manque de tension vers la fin du Requiem, où plane par ailleurs une certaine fatigue, derrière la fermeté.
Le concert s’achève néanmoins sous une cascade d’applaudissements et les interprètes reviennent plusieurs fois saluer sur scène – toujours sous la direction d’Hervé Niquet qui mène la danse. Aucun bis n’étant prévu, c’est l’esprit encore animé des feux et des lamentations du chœur que les spectateurs s’en retournent dans la froide nuit parisienne.