Cantates françaises au Festival Ouverture de Semur-en-Auxois
Le répertoire de cantates pour une ou deux voix et petit ensemble, qui a émergé dans les deux premières décennies du XVIIIe siècle, est l'une des gloires du baroque français.
La cantate Médée de Louis-Nicolas Clérambault pousse à l'extrême le modèle de l'alternance des récitatifs et des arias, de rage, à faire trembler les os ("Courons à la vengeance") contrastant avec un air tendre ("L'amour dans ses fers") accompagné par la flûte allemande et le violon (mais sans basse, de sorte que le seul clavecin picore délicatement et exclusivement dans le registre aigu). "Cruelle fille des Enfers" s'impose en pièce maîtresse de l'œuvre, Médée appelant les filles de l'Enfer à punir sa rivale, Créuse, la fille de Créon pour laquelle Jason l'a abandonnée. L'ensemble joue alors de rythmes frémissants et très chromatiques contre les lignes vocales déchiquetées.
La partition de Clérambault s'avère un véhicule remarquable pour les talents musicaux et dramatiques d'Emmanuelle de Negri (connue dans l'univers promu par Les Arts Florissants, mais qui charme dans tous les registres). La soprano déploie des phrasés bien planifiés – certains d'une grande beauté, d'autres, quand il le faut, d'une grande force. Sa performance est marquée par un contrôle complet de l'articulation et de la dynamique, mais c'est sa maîtrise dramatique qui lui assure le contrôle de toute la soirée, donnant une incarnation mémorable de Médée.
Renato Dolcini ouvre pour sa part le concert avec une interprétation du Mars Jaloux de Jean-Baptiste Stuck. Son baryton est fort à son avantage dans les nombreuses arias de rage virtuose, soutenues par des notes graves assurées et complétées par un doux registre aigu.
Les deux solistes lyriques unissent leurs forces dans l’Héraclite et Démocrite de Stuck, (relativement) plus connu, une juxtaposition comique des tendances stoïciennes et épicuriennes de la philosophie présocratique. Les arias solistes impressionnent mais l'alignement des deux voix complémentaires passionne.
Le concert comprend également le Tombeau de Monsieur de Lully de Jean-Féry Rebel pour l'ensemble instrumental, joué avec la passion et la dignité de son sujet. Le Théâtre du Rempart, avec toute l'intimité de ce lieu seyant à ce répertoire, reçoit le témoignage du public ayant grandement apprécié ce deuxième concert du Festival.