Karine Deshayes et Delphine Haidan : les demoiselles lyriques d'Avignon
Le concert est un voyage à travers le répertoire lyrique français et italien, réunissant ainsi deux nations-sœurs, à l'image métaphorique des deux solistes. Ce programme emmené par un trio féminin et "en collaboration avec le Palazzetto Bru Zane dans le cadre de leur festival consacré aux compositrices françaises du XIXème siècle", est ainsi paritaire, réunissant Rossini, Berlioz, Bellini avec Pauline Viardot, Louise Bertin, Clémence de Grandval, .
Se montrant dans l'esprit de ce programme, à la fois dynamique et même joueuse par moments, Debora Waldman, Directrice musicale de l'Orchestre national Avignon-Provence le conduit d'une manière très claire et nuancée avec une grande précision et des intentions fortes. Ses gestes fermes assurent la synchronisation de la phalange, avec un son envoûtant, riche et très juste, sur des piliers qui marquent clairement le rythme.
Les deux mezzo-sopranos Karine Deshayes et Delphine Haidan, qui travaillent ensemble depuis plusieurs années, commencent d'emblée ce récital par un duo (Vivere io non potrò) déployant immédiatement leurs qualités vocales individuelles et réunies en captivant l’attention du public. Les deux voix vont très bien ensemble. Elles exhibent toutes les deux une grande musicalité, avec de beaux phrasés et un chant joliment nuancé. Leurs timbres, aigu et grave, donnent vie à un contraste très agréable à l’oreille, deux voix qui tourbillonnent l’une autour de l’autre et qui voyagent librement dans la salle.
Le mezzo en solo de Delphine Haidan se distingue dans le grave mais très raffiné, avec un timbre chaud, et d’une grande sensibilité dans son expression musicale, grâce à un legato très élégant (elle y est cependant couverte par sa collègue et l’orchestre, ceci jusqu'aux médiums). Karine Deshayes fait montre d’une voix de mezzo qui aspire davantage aux altitudes, avec des aigus brillants, une importante projection et une grande expressivité vocale comme théâtrale (adoptant rapidement l’état d’esprit des personnages qu'elle incarne même dans ce cadre du récital). Ses grandes vocalises agiles et élastiques paraissent faciles. Cependant, elle tape étonnamment la pulsation du pied plusieurs fois pendant le concert (ce qui perturbe plusieurs auditeurs).
Après une superbe première soirée à l'Opéra Grand Avignon hier, l'Onap dirigé par Debora Waldman et les deux mezzo-sopranos Karine Deshayes et Delphine Haidan seront en concert demain soir à la @philharmonie de Paris. Réservez vos places https://t.co/2Qxox8du9G pic.twitter.com/J8DMJuAwxQ
— Orchestre National Avignon-Provence (@OrchAvignonPvce) 13 octobre 2022
Non moins reconnaissant et enthousiaste, le public applaudit les artistes pendant de longues minutes, artistes qui remercient et récompensent cette ovation avec deux bis, la Barcarolle d’Offenbach et, en un espagnol très bien prononcé, El desdichado de Saint-Saëns.