L'Opéra national de Lorraine donne Rendez-vous près du feu, Place Stanislas à Nancy
Ce spectacle contemporain dans le cadre de ce laboratoire de création lyrique, annoncé et présenté par Matthieu Dussouillez, le Directeur nancéien, pour une ouverture de saison accueillant le Festival Musica, fait une double référence, par sa thématique écologique, aux Jardins Éphémères installés sur la Place Stanislas, devant l'Opéra, mais aussi à l'opéra contemporain Like Flesh donné dès le lendemain.
Il est 21h30, il pleut, le mercure affiche 10 degrés et pourtant une centaine de personnes patientent devant le bâtiment de l'Opéra national de Lorraine place Stanislas, avec courage, parapluie ou capuche, et surtout l'envie de découvrir ce rendez-vous et de venir se réchauffer aux sons de ce NOX#2 intitulé "Rendez-vous près du feu". Ce sont même quatre éléments qui sont ici évoqués (eau, feu, terre, air) dans le contexte d'un message environnemental, avec un tourbillon d'interactions musicales et textuelles, recourant parfois à des jeux de mots typiques de la richesse de la langue française.
Le spectacle est mis en lumière et projection vidéo sur le bâtiment de l'opéra par Victor Egéa, qui met à la fois en relief les formes naturelles du bâtiment, et prolonge le regard vers les musiciens instrumentistes installés à l'intérieur, derrière les fenêtres du rez-de-chaussée et du premier étage. L'ensemble est réparti et trouve néanmoins sa cohérence : les instruments à vent sont au premier étage, avec une trompette, un hautbois, une flûte traversière, un saxophone baryton, un trombone et une clarinette tandis que de façon assez déstructurante, un ensemble de percussions dont une batterie et des cloches tubulaires est placé à l'extrême gauche de l'étage. Quant aux violon, violon alto, contrebasse et vibraphone, ils forment une ligne de gauche à droite dans le rez-de-chaussée du bâtiment, le tout évoquant l'harmonie d'une fosse d'orchestre réinventée et étagée avec une richesse sonore effectivement chaleureuse.
Ce NOX est un mini-opéra mettant en scène ces musiciens sonorisés ainsi que la soprano ukrainienne Viktoriia Vitrenko dont toute l'intervention soliste est enregistrée et projetée. Sa voix, visiblement captée via un micro plutôt proche d'elle, suggère l'intimité surréaliste d'un rapport aux éléments. Les conditions de captation sonore ne permettent pas de pousser la dynamique de son chant, mais son vibrato moyennement large compense la contrainte technique et lui donne un peu de relief, tout en rendant le texte en français compréhensible, racontant comme une déambulation du personnage dans un espace naturel, en quête d'une compréhension de la nature. Les artistes des chœurs de la maison lorraine ponctuent la courte dramaturgie par des interventions parfois syllabiques, en octaves et unissons, parfois un peu plus dynamiques, mais toujours avec beaucoup de retenue et peu de vibrato.
Les musiciens, en costume de scène classique, effectuent de petits gestes théâtraux. De quoi entrevoir pour certain, dans cette scénographie signée Clémence de Vergnette, une lointaine inspiration des chorégraphies musicales adoptées dans les opéras de Karlheinz Stockhausen, dans une version toutefois moins exubérante.
Après 25 minutes de spectacle, le public de divers horizons applaudit et voit les artistes de la maison sortir de la porte principale pour saluer, les musiciens de l'étage saluant à la fenêtre. Une minute et demie d'applaudissements dans un froid humide, qui aurait peut-être été l'équivalent d'un remerciement bien plus long par temps plus chaud.