Mélodies suédoises avec Marine Chagnon et Joséphine Ambroselli au Festival Jeunes Talents
La saison 21/22 semble marquer un tournant dans la carrière de la jeune mezzo-soprano française Marine Chagnon. Devenue membre de l'Académie de l'Opéra de Paris en septembre 2021, elle vient de sortir son tout premier disque en collaboration avec la pianiste Joséphine Ambroselli. Ce projet, intitulé Ljus, la lumière de Suède, rend hommage aux compositeurs et mélodies de ce pays scandinave, pourtant largement méconnues en France et plus généralement en dehors du sol natal. Le programme est présenté en public dans l'intimité et la splendeur de l'Hôtel de Soubise (aux Archives nationales), pour un concert du Festival Jeunes Talents (qui accueillait déjà la mezzo-soprano en clôture de l'édition estivale en 2021). Ce voyage artistique est une immersion musicale mais aussi culinaire dans la lumière et la mélancolie du Grand Nord, au goût des Kanelbullar (brioches à la cannelle) distribuées dans la salle par les deux artistes.
Musicalement et poétiquement ancrés dans cet esprit scandinave, les 15 chants sélectionnés avec des caractères divergents mettent à l'épreuve les capacités vocales de Marine Chagnon. Ce choix lui permet le déploiement d'une vaste palette d'émotions, peignant cette blancheur nordique par une voix lumineuse et résonnante. Son diapason médian est sa terre d'asile, très assuré et nourri vocalement, avec une émission mesurée et élégante dans les airs lents et doux. L'articulation du texte s'avère nette et intelligible, juxtaposée à une longueur de souffle solide et un phrasé musical tout en velours. L'air de Gustaf Nordqvist Till havs (En mer) représente l'apogée de sa soirée, avec son chant aux couleurs wagnériennes. Néanmoins, les passages touchant les extrémités de sa tessiture sont moins convaincants, l'intonation se fragilisant sur un son minci et une projection vacillante.
Outre son accompagnement sûr et haut en couleurs, la pianiste Joséphine Ambroselli offre au public deux transcriptions pour piano seul. Elle privilégie les tempos modérés et lestes où les sonorités impressionnistes brossent un paysage musical intime (notamment celui de Nordqvist), avec notamment des accords étouffés qui forment la pierre angulaire de l'intimité du genre mélodique. Ces accords soutiennent habilement une gradation dynamique très délicate et nuancée. Enfin, la pianiste fait preuve de virtuosité dans un air fougueux qui alterne les registres, tempi et les rapides arpèges, exposant avec conviction ses multiples talents.
Le concert s'achève dans une atmosphère chaleureuse et conviviale, par un bis gai et valsé qui invite le public à rejoindre les artistes dans le hall de l'hôtel de Soubise pour un échange et les signatures du disque.