L'Opéra de Rennes ressuscite La Cenerentola de Jérôme Savary
Luigi de Donato (Alidoro) et José Maria Lo Monaco (Angelina) © Laurent Guizard
Créé à Genève en 1993, La Cenerentola de Savary avait été également joué au Palais Garnier en 2002. Jérôme Savary en avait fait une adaptation enjouée, dans laquelle les sœurs de Cendrillon étaient devenues des précieuses dont le ridicule s'épanouissait davantage dans le rire que dans la cruauté. L'homme de scène s'en était allé en 2013, laissant derrière lui une carrière solide dans le monde de l'opéra, du théâtre et du cirque. Après La Traviata en 2013, l'Opéra de Rennes s'enquiert cette année du génie rossinien et de la mise en scène tonitruante de Savary.
Le chef Darrell Ang dirige ici l'Orchestre Symphonique de Bretagne et offre avec lui un terrain fertile propre à l'épanouissement de cette distribution, dont la bonhomie parvient facilement à atteindre le spectateur. Marc Scoffoni (Dandini) ne manque pas une occasion d'associer le public à ses facéties de parfait usurpateur ; Anna Steiger et Jeannette Fischer se plaisent à retremper le tandem Tisbé et Clorinda dans la sauce burlesque qu'elles avaient déjà cuisinée en 2002, aux côtés de Joyce DiDonato et Juan Diego Florez ; Alidoro (Luigi De Donato) emplit la salle de l'air "La del ciel, nell'arcano profondo" de sa voix puissante.
Anna Steiger (Tisbé), Marc Scoffoni (Dandini), Jeannette Fischer (Clorinda) © Laurent Guizard
Misant sur le burlesque et l'esclaffade, la mise en scène de Savary met à jour les gènes de l'opéra-bouffe qui coule dans les veines de cet opéra, le dernier du genre écrit par Rossini. Ici, le caractère merveilleux du conte de Perrault a été souligné. Si sa pantoufle de vair a été remplacée par deux bracelets, Cendrillon s'empresse de montrer son pied au Prince. Alors qu'il ne s'agit plus d'une fée mais du mage Alidoro, la présence d'une citrouille rappelle le carrosse qu'avait fait apparaître la marraine de Cendrillon.
La mise en scène de Savary ayant été déclassée, les décors ont dû être récréés pour l'occasion. L'opération a pu compter sur Ezio Toffoluti, aux costumes et aux décors lors de la production au Palais Garnier. Frédérique Lambart est restée fidèle à l'ancien directeur de l'Opéra Comique, tout en glissant quelques hommages, comme l'écossais toujours présent dans les productions de Savary, et ici sur scène.
L'opéra est à découvrir à l'Opéra de Rennes jusqu'au 5 juin, date à laquelle La Cenerentola sera retransmise en direct et en multidiffusion sur la Place de la Mairie et aux Champs Libres de Rennes, ainsi que dans de nombreuses villes bretonnes.
(Crédits photographiques cover : © Laurent Guizard)